Evalang, pour qui et pourquoi ?

La note de service du 03/02/2021 officialise la mise en œuvre et les modalités du test de positionnement numérique en anglais pour les élèves de 3e. https://www.education.gouv.fr/bo/21/Hebdo7/MENE2103043N.htm

« Ce test baptisé Ev@lang collège est un test de positionnement adaptatif en langues vivantes étrangères entièrement en ligne. Il permet d’évaluer les compétences des élèves en compréhension de l’oral, compréhension de l’écrit et compétences linguistiques (grammaire et lexique). Le test se décline en 5 versions, une version commune et quatre versions aménagées pour les élèves à besoins éducatifs particuliers. »

Note de service – 3 février

Le concepteur de ce test est France Education International (anciennement CIEP), établissement public placé sous la tutelle directe du ministère chargé de l’Éducation nationale.

Il concerne tous les élèves scolarisés en classe de troisième, en collège ou en lycée professionnel, qui suivent un enseignement d’anglais en langue vivante 1 ou 2 (LV1 ou LV2) :

  • les élèves de troisième des établissements publics et privés sous contrat d’État, y compris les élèves scolarisés dans les classes des sections d’enseignement général et professionnel adapté (Segpa), scolarisés dans les unités pédagogiques pour les élèves allophones arrivants (UPE2A) et scolarisés au sein des unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis) ;
  • les élèves inscrits en troisième prépa-métiers ;
  • les élèves des établissements régionaux d’enseignement adapté (EREA).

Il s’agit donc ici de tester toute une classe d’âge et de déterminer leur niveau en anglais uniquement.

Ce test entièrement en ligne devra avoir lieu dans les établissements du 6 avril au 28 mai inclus. Chaque établissement disposera de trois semaines pour assurer la passation de ce test.
Les compétences testées le seront sur la base du Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL). Les dates ont été publiées ici https://www.education.gouv.fr/bo/21/Hebdo8/MENE2105971N.htm

Pour compléter les instructions du ministère Eduscol a mis en ligne un guide à destination des professeurs : https://eduscol.education.fr/2656/evalang-college

L’introduction de ce test fait partie des 10 mesures du plan langues vivantes initié suite à la publication du rapport Manès-Taylor . « En concordance avec les préconisations du rapport Manès-Taylor, Oser dire le nouveau monde, propositions pour une meilleure maîtrise des langues vivantes étrangères, le test numérique Ev@lang collège vient renforcer la dynamique de référencement au cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) et constitue un pilier majeur du plan langues vivantes (mesure 6). »

Tester, certifier ou piloter ?

Il s’agit donc de définir le niveau atteint par les élèves en anglais en fin de cycle 4 , mais pas de certifier : «Le test, non certifiant, ne constitue pas une évaluation de la performance de l’enseignement dispensé, dont il ne couvre pas tous les champs, et il ne se substitue pas aux évaluations réalisées par les professeurs au fil des apprentissages dans les cinq activités langagières. Il fournit une image du niveau atteint pour une cohorte d’élèves dans les mêmes compétences et au même moment.» Il n’y aura donc aucun lien avec le DNB et ne constitue pas un examen de langues.

D’après la note de service, le but est de fournir un «outil de pilotage de la discipline au niveau national, académique et de chaque établissement». Les résultats seront donc analysés et exploités à tous les échelons pour parvenir à un apprentissage plus efficace de l’anglais.

Cette initiative aurait donc un intérêt pour les élèves et pour l’institution  :

« À l’issue du test, une fiche de résultats est délivrée aux élèves les positionnant sur l’échelle de niveau du CECRL. L’enjeu de cette reconnaissance du niveau des élèves est double :

  • les encourager et leur permettre de progresser ;
  • proposer un outil de pilotage de la discipline au niveau national, académique et de chaque établissement. »

Comment ?

Les différentes épreuves du test permettent de positionner les élèves du niveau A1 au niveau B1+ du CECRL dans les activités langagières de réception :

  • compréhension de l’oral ;
  • compréhension de l’écrit.

La durée du test est de 30 minutes sur ordinateur.

La passation est de la responsabilité des professeurs d’anglais. Tout devra être fait au sein de la classe et pendant les horaires de cours habituels.
Les professeurs devront assurer la bonne tenue du test, y compris la mise en place technique (ordinateurs, casques, etc.)

« Le test ne couvre pas tout le champ des apprentissages du cours de langue vivante et ne remplace pas l’évaluation des acquis effectuée par le professeur.

Les élèves sont entraînés aux activités langagières et à la compétence linguistique dans le cadre des séances d’anglais, sans préparation spécifique au test lui-même.

Il est indispensable en revanche de donner aux élèves des informations sur les objectifs et les étapes du test ainsi que sur l’utilisation de la plateforme.

Le professeur veille par conséquent à :

  • apporter aux élèves des informations sur le déroulement du test et sur ses enjeux ;
  • présenter en amont les supports (tutoriel vidéo et diaporamas) mis à disposition pour les familiariser à l’ergonomie et au déroulement du test, y compris les consignes qui sont données dans la langue cible. »

Il n’y a pas, officiellement, de préparation spécifique au test mais un travail en amont est nécessaire pour en assurer le bon déroulement et familiariser les élèves avec le contenu.

Notre analyse

Nous constatons l’introduction d’une nouvelle tâche incombant aux professeurs exerçant en collège. D’après la note de service il ne s’agirait pas d’une évaluation supplémentaire. Toutefois nous ne pouvons que nous interroger sur la finalité d’un tel dispositif.

En effet malgré l’affirmation qu’il ne s’agit pas d’une évaluation du travail des professeurs ,(«Le test, non certifiant, ne constitue pas une évaluation de la performance de l’enseignement dispensé, dont il ne couvre pas tous les champs, et il ne se substitue pas aux évaluations réalisées par les professeurs au fil des apprentissages dans les cinq activités langagières. Il fournit une image du niveau atteint pour une cohorte d’élèves dans les mêmes compétences et au même moment.») la mention d’un «outil de pilotage de la discipline au niveau national, académique et de chaque établissement» soulève quelques interrogations. Cet outil de pilotage n’est-il pas, en fait, un moyen de contrôle déguisé ? Cette impression est renforcée par la phrase «Un test de positionnement est un outil de formation pour tous les acteurs favorisant un retour réflexif sur les modalités d’apprentissage mises en œuvre et sur l’élaboration de la progression pédagogique, dans l’établissement et dans la classe.». Comment ne pas en déduire que chaque enseignant.e, chaque établissement ne sera pas l’objet d’une certaine forme d’évaluation ou de contrôle des pratiques ?
Nous ne pouvons que nous interroger sur les répercussions de cette réflexion et de cet outil de formation. Tout cela ne se traduira-t-il pas par une transformation radicale du métier d’enseignant de langue ?

Chaque professeur devra, en outre, sensibiliser et préparer ses élèves à ce test. La tentation sera grande d’adapter ses pratiques et le contenu de ses cours afin d’assurer la réussite de ses élèves.

La mise en place de cette évaluation supplémentaire occasionnera, sans aucun doute, un surplus de travail pour tous les professeurs d’anglais qui doivent en assurer la passation.

Il est peut-être intéressant de dresser un bilan à la fin du collège pour permettre aux élèves de se rendre compte du niveau qu’ils ont atteint en anglais. Toutefois nous pouvons nous demander si un tel dispositif ne va pas aboutir au néfaste «teach to the test» qui aurait un effet désastreux sur le contenu et les pratiques. Le danger de vider les cours d’une grande partie de leur contenu culturel au profit d’un entraînement aux tests est réel.

Au delà de ces interrogations et inquiétudes, on en peut s’empêcher de penser aux « standardized tests » à l’américaine qui servent bel et bien à évaluer les établissements et l’enseignement qui y est dispensé. Il va sans dire que la concurrence entre établissements ne fera que s’accentuer, à l’instar de celle qui existe déjà entre le public et le privé. De la même façon, la pression qui sera exercée sur les enseignants par les chefs d’établissements, les parents et les élèves deviendra insupportable.

Si la note de service insiste sur le fait que les résultats du test de positionnement ne servent pas à une évaluation de l’enseignement dispensé, le phrase indiquant que «Les responsables nationaux, les recteurs et cadres académiques, les chefs d’établissement les analysent pour identifier et mettre en œuvre, à leur échelle, les mesures et les stratégies les plus favorables aux apprentissages en langues vivantes » indique clairement que les enseignants seront soumis à des injonctions et risquent de voir leur liberté pédagogique fortement affectée.

Les enseignants qui exercent leur métier dans des conditions déjà difficiles, surtout en cette période de pandémie qui a entraîné des conditions de travail très particulières, une modification de leurs pratiques, une surcharge de travail, un stress et une fatigue supplémentaires, se voient imposer cette tâche qui n’a pas fait l’objet d’une concertation. Le SNES-FSU demande qu’Ev@lang ne soit pas mis en place cette année. Il y a nécessité d’alléger la charge de travail des personnels pour prendre en compte les conséquences pédagogiques de la crise sanitaire qui pèsent sur le métier.

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