mardi 31 mars 2020 (mise à jour du 16 avril : lire en particulier les 5 premiers §§)

« Les concours externes qui n’ont pas commencé, ce qui concerne un peu moins de 180 000 candidats, sont réorganisés. Les épreuves d’admission, qui auront lieu au mois de juin et de juillet, seront constituées des seules épreuves écrites. A la rentrée, ces fonctionnaires stagiaires bénéficieront d’un accompagnement renforcé et de la visite d’un inspecteur pour faire le point. Au printemps 2021, la procédure de titularisation comportera un oral dont les contours seront définis dans les prochaines semaines. », peut-on lire dans le communiqué du Ministère publié le 15/04 ]

En pleine catastrophe sanitaire, le Président de la République, le Premier Ministre et le Ministre de l’Éducation nationale continuent de se servir de la pandémie pour imposer un calendrier sur tout ce qui n’a strictement rien d’urgent, dont les concours de recrutement. Empêtrés dans une polémique qu’ils ont eux-mêmes provoquée sur une très dangereuse réouverture des collèges et lycées le 11 mai, ils se précipitent « en même temps » pour annoncer de non moins dangereux rassemblements de centaines de milliers de candidats en juin ou en juillet : depuis l’intervention du Chef de l’État lundi 13 avril, le principe d’incertitude et la règle du danger maximal sont devenus les dogmes officiels de l’Éducation nationale (alors que ceux qui prévalent en matière fiscale, restent scandaleusement inchangés !).

On comprend bien l’urgence qui anime en réalité le Ministère : l’Éducation nationale a besoin de recruter au 1er septembre, pour faire garder les enfants des salariés et redémarrer l’économie à l’automne. Toujours les profits avant la santé publique, toujours l’intérêt privé de quelques ultra-privilégiés avant l’intérêt général. Remarquons au passage – à l’intention des collègues qui pensent à tort que les journées de grève dans l’enseignement sont indifférentes au gouvernement (et au MEDEF…) – l’importance stratégique de l’école comme « garderie », ce qui montre que le corps enseignant a plus de puissance sociale et économique qu’il ne le croit d’ordinaire.

Ainsi, on nous annonce un recrutement basé sur les seules épreuves écrites. S’agissant de futurs professeurs, cela n’a aucun sens : comment un jury pourrait-il savoir si une ou un candidat est apte à enseigner sans l’avoir entendu(e) à l’oral ? Quant à l’oral de titularisation « au printemps 2021 » (oral dont le SNES-FSU ne veut pas ), il s’annonce plus ubuesque encore : visiblement, le Ministère a moins que jamais renoncé à son fameux « entretien de motivation », sur le modèle décidément « universalisable » du Grand Oral de l’ENA. Depuis plus d’un an, le Ministère fait tout pour imposer cet entretien à l’oral du CAPES. Alors que les réformes du CAPES 2022  et des Masters MEEF 2020  ont été massivement rejetées par la communauté éducative, INSPÉs compris, il serait urgent de pendre le temps d’écouter la profession.

Quant au sort très préoccupant des non-titulairesle SNES-FSU est intervenu dès le 16 mars  afin de procéder au renouvellement des contrats en cours (CDD, CDI) et de suspendre la règle des 4 mois permettant la conversion d’un CDD en CDI. Rappelons que le mandat du SNES-FSU en la matière est de dispenser les non-titulaires des épreuves théoriques afin de leur donner directement accès à l’année de stage (Mandats du SNES-FSU congrès de Grenoble ), ce qui aiderait grandement pour la rentrée 2020, sous réserve d’augmenter en proportion le nombre de places aux concours…

En janvier, une tribune-pétition portée par la quasi-totalité des membres du jury du CAPES externe de philosophie a rencontré un large écho chez les professeurs de philosophie et au-delà. Édouard Geffray, le DGESCO, a souhaité rencontrer des rédacteurs de cette pétition. L’entrevue a eu lieu le 2 mars 2020. Pour un résumé du dossier, vous trouverez ci-dessous l’introduction et la conclusion du compte rendu de cette entrevue (CR complet ici ) :

« Le 20 novembre 2019, les trois directions chargées du recrutement des professeurs statutaires aux Ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur et de la recherche (DGESCO, DGRH pour le premier ; DGESIP pour le second) annonçaient une refonte complète du recrutement des enseignants. D’après les « livrables » présentés par ces trois directions, aux concours du CAPES, seule la première épreuve écrite conservait un caractère disciplinaire. La seconde épreuve écrite devenait la conception  d’une séquence pédagogique, les candidats ayant accès à Internet ​via une tablette. La  seconde épreuve orale devenait un entretien de motivation pour évaluer la capacité du  candidat à « verbaliser les valeurs de la République » et à « se positionner en fonctionnaire ».  

Parallèlement, avant même de présenter le concours, obligation était faite aux   étudiants de Masters MEEF (Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) d’effectuer un stage en alternance, en responsabilité devant des classes et pour une faible rémunération. Le stage de titularisation, qui aujourd’hui est de l’ordre du mi-temps, passait à un plein-temps (ou 80% ou 90%). 

Tout l’hiver, la communauté éducative et universitaire a multiplié tribunes, pétitions et motions exigeant le retrait de ce projet de refonte. Parmi ces textes, une pétition émanant de la quasi-totalité du jury du CAPES externe de philosophie a recueilli, en un mois, le soutien du tiers des enseignants-chercheurs et du quart des professeurs de lycée (secondaire et CPGE) de cette discipline. La Direction générale de l’Enseignement scolaire a souhaité rencontrer des membres du jury rédacteurs de cette pétition.    

L’arrivée de la pandémie et le confinement on retardé la parution de ce compte rendu.  À présent, dans le cadre juridique ouvert par la Loi d’urgence sanitaire ​n° 2020-290  du 23 mars 2020​, les deux Ministères diminuent le nombre et modifient la nature des  épreuves de tous les concours. » 

« Sur le calendrier et sur la méthode : compte tenu de la crise sanitaire que connaît le pays, il apparaît avec une évidence chaque jour plus grande que la première chose à faire est d’interrompre la mise en œuvre de réformes qui, comme on l’a vu, pèchent en premier lieu par précipitation et par méconnaissance du terrain. Notre conviction est qu’il s’imposait déjà avant la pandémie, et qu’il s’impose d’autant plus avec elle, de prendre ​au moins une année supplémentaire pour consulter, ​réellement et non pour la forme, les personnes compétentes (préparateurs, jurys de concours, responsables de Masters disciplinaires et de Masters MEEF, corps d’inspection), afin de déterminer quelles éventuelles réformes, d’une part des concours et d’autre part des Masters MEEF ,seraient non seulement réalisables, mais aussi, et en premier lieu, souhaitables. 

Aujourd’hui, il est à craindre que la session 2020 des CAPES et des CRPE ne permette pas de préserver la qualité du recrutement des professeurs.

    Il est à craindre que cette session, inévitablement marquée par l’urgence sanitaire, ne constitue une sorte d’expérimentation d’un projet que les deux Ministères envisagent depuis deux ans.  

  Il est à craindre, enfin, que ce qui sera imposé par l’urgence à la session 2020 ne revête  par la suite un caractère pérenne. » 

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