Depuis deux ans, les décisions ministérielles s’accumulent au détriment de la Technologie au collège. Et comme pour les groupes de niveau – dont le SNES-FSU n’a cessé de rappeler qu’ils fragilisaient le service public d’éducation sans jamais améliorer les apprentissages – la politique menée à l’égard de la Technologie suit la même logique : désorganisation, absence de vision pédagogique, coupes budgétaires et mépris des personnels.
Les témoignages des collègues, comme la récente interpellation de l’association PAGESTEC adressée au ministre, confirment ce que nous constatons sur le terrain : la disparition progressive de la Technologie n’est plus une crainte, c’est un processus en cours. Le SNES-FSU lutte pied à pied contre toutes les mesures qui affaiblissent et attaquent la Technologie et porte des exigences fortes et concrètes pour cette discipline.
1. Une succession de réformes qui déstabilisent la discipline
La suppression de la Technologie en 6ᵉ en 2023 – sans concertation – a été présentée comme une occasion de « revaloriser » la discipline sur les autres niveaux. Des formations longues et solides ont été promises, l’engagement a été pris de maintenir les postes et une ambition a été affichée pour la réécriture des programmes. Mais loin de renforcer la discipline, cette mesure a entraîné :
- la disparition d’une année complète d’apprentissage, alors même que le projet de socle commun rappelle l’importance « d’imaginer, fabriquer, créer, expérimenter » et de disposer d’une culture scientifique et numérique ;
- des services partagés et des suppressions de postes en nombre dans un vaste plan social que le ministère a voulu cacher ;
- la suppression massive de groupes allégés, afin de financer des groupes de besoins en français et mathématiques ; d’où une dégradation des conditions d’enseignement, avec des classes à plein, jusqu’à 30 élèves, dans une discipline expérimentale qui requiert manipulation, sécurité et accompagnement individualisé.
Aucune des promesses ministérielles de l’époque – revalorisation de la discipline, maintien des postes, formation universitaire diplômante – n’a été tenue. Les constats sur le terrain sont sans appel : postes supprimés, formation réduite à des visioconférences sur le temps libre des enseignant·es, matériel non financé malgré de nouveaux programmes.
Les évolutions récentes du recrutement et de la formation initiale des enseignant.es, ainsi que les réorganisations des INSPE, ont modifié l’offre de formation sur le territoire. Ces transformations ont aggravé les tensions déjà existantes sur le recrutement des professeur.es de Technologie. Recrutement qui n’a cessé de diminuer depuis la suppression du CAPET de Technologie en 2012, remplacé depuis par le CAPET SII.
Le contraste entre les discours du ministère et les coupes des moyens accordés à la discipline est insupportable.
2. Une incohérence entre ambitions, moyens et mise en œuvre.
L’intégration des objectifs du socle commun dans l’évolution des programmes de Technologie alourdit un programme déjà difficilement réalisable. (voir projet d’aménagement de juin 2025)
Les attendus sont pourtant renforcés sur les dimensions : culture du numérique et compréhension des enjeux de l’IA, éducation au développement durable et analyse des systèmes techniques, maîtrise des objets et des démarches de création et d’expérimentation, contribution au développement de l’esprit critique par la démarche scientifique et technique, le travail des compétences psychosociales…
Outre le fait que certaines de ses dimensions, accolées à des compétences disciplinaires, posent des problèmes de fond et sont plus que discutables, ces ambitions se heurtent à la réalité des conditions d’enseignement. Les moyens alloués à la discipline, en particulier pour le travail en groupes, sont aujourd’hui insuffisants et difficilement compatibles avec les dotations horaires globales des établissements.
Dans ces conditions, prétendre garantir à tous les élèves une compréhension des transformations technologiques d’hier et de demain, alors même que l’enseignement de la Technologie est fragilisé par des réductions d’horaires et de moyens, relève d’un objectif difficilement tenable.
Le SNES-FSU dénonce le creusement des inégalités :
- Seuls les établissements favorisés peuvent maintenir un niveau acceptable d’équipement.
- Les élèves des établissements ruraux ou défavorisés sont les premiers à perdre l’accès à un enseignement technologique ambitieux.
- La suppression des postes et la non-réouverture de concours dédié entraîne une réduction de l’offre, aggrave la pénurie de professeur·es et fragilise les équipes.
La Technologie est pourtant un levier puissant pour raccrocher les élèves, notamment grâce à la pédagogie de projet, à la manipulation, à la créativité, et à la pluridisciplinarité.
3. Le SNES-FSU demande des mesures concrètes et immédiates !
La technologie ne doit plus être la variable d’ajustement des réformes successives. Le SNES-FSU défend la technologie comme une discipline de culture commune, à fortiori dans un monde où les systèmes techniques complexes occupent une place croissante et où les questions liées à la souveraineté industrielle, à la déferlante de l’intelligence artificielle et à la crise écologique, sont cruciales.
- Remettre la technologie en 6e. La fin des groupes de niveau obligatoires va libérer des moyens qui doivent être dirigés en priorité et dès la rentrée prochaine vers le rétablissement de l’heure de technologie en 6e. L’horaire doit être garanti.
- Financer des dédoublements, indispensables pour garantir, dans cette discipline expérimentale, sécurité et qualité pédagogique.
- Remettre l’heure de laboratoire indispensable pour préparer les activités pratiques au même titre que les SPC et SVT
- Moratoire sur toute suppression de poste de Technologie.
- Réouverture d’un CAPET de Technologie assorti d’un plan pluriannuel de créations de postes pour rétablir les capacités d’enseignement perdues depuis 2010.
- Mise en place d’une formation diplômante, en présentiel, financée par l’État. Les pôles universitaires de formation actuellement fermés ou menacés doivent être rouverts et préservés.
- Financement par l’État du matériel technologique imposé par les nouveaux programmes. Les dotations doivent être évaluées pour gommer les inégalités territoriales et assurer un équipement suffisant et la maintenance dans tous les collèges.
En résumé,
Les choix opérés ces dernières années ont profondément fragilisé l’enseignement de la Technologie au collège. La suppression de la discipline en sixième a rompu la continuité des apprentissages et envoyé un signal particulièrement négatif aux équipes, qui voient leur expertise et leur engagement remis en cause.
Alors que les programmes affichent des ambitions toujours plus élevées en matière de culture scientifique, numérique, technologique… les moyens humains, horaires et matériels ne cessent de se réduire. Ce décalage constant entre les objectifs assignés et les conditions réelles d’exercice alimente un sentiment largement partagé : celui d’un enseignement relégué au second plan, malgré son rôle essentiel dans la formation des élèves.
Pour le SNES-FSU, il est urgent de sortir de cette logique et de redonner à la Technologie toute sa place dans la scolarité obligatoire de la sixième à la troisième. Cela suppose de revoir les contenus des programmes, de donner des moyens en cohérence avec les contenus disciplinaires et d’affirmer une réelle volonté politique afin de garantir à tous les élèves un accès équitable à une culture technologique ambitieuse.
Voir article Clap de fin pour les groupes de niveau ?








Élections professionnelles :