Code de l’éducation

Article L 141-1 :

Comme il est dit au treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946
confirmé par celui de la Constitution du 4 octobre 1958, « la Nation garantit l’égal accès
de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation et à la culture ; l’organisation de
l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État ».

L’enseignement, dès l’origine et encore aujourd’hui, constitue un point d’ancrage
particulièrement sensible dans le débat sur la laïcité.

À côté de la liberté de l’enseignement dont le Conseil constitutionnel a considéré qu’elle constituait un principe fondamental reconnu par la République (décision du 23 novembre 1977, n° 77-87 DC Recueil page 42), la laïcité constitue l’une des composantes essentielles du système d’enseignement français, et cela depuis la loi du 28 mars 1882.
En dépit de cette exigence de neutralité confessionnelle de l’enseignement, la
jurisprudence a fait preuve d’une certaine souplesse.
Ainsi, avant que la responsabilité de la construction d’établissement scolaire du second degré ne soit transférée aux départements et aux régions, le Conseil d’État a-t-il considéré que le ministre de l’Éducation nationale n’avait commis aucune illégalité en incluant dans le programme de construction d’un établissement du second degré l’édification d’un pavillon culturel affecté à la célébration des cultes catholiques, protestants et israélites, dès lors que les sommes engagées n’excédaient pas les charges pouvant incomber à l’État en application de la loi de 1905 (Conseil d’État, 7 mars 1969, Ville de Lille, le Bombage 141).

De la même façon, la cour administrative d’appel de Nantes a considéré que ne constitue pas un emblème religieux au sens de l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation de l’Église et de l’État qui interdit la position sur l’édifice public, l’emblème du département de la Vendée apposé sur le fronton de deux collèges publics, constitué par deux cœurs surmontés d’une couronne portant une croix (cour administrative d’appel de Nantes, 11 mars 1999, association Une Vendée pour tous les Vendéens, Lebon Table 668).

Enfin, la législation applicable dans les deux départements d’Alsace et celui de la Moselle, relative à l’enseignement religieux obligatoire, a été considérée comme ne
méconnaissant pas l’article L 141-1 du Code de l’éducation, ni les dispositions de la
Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme relative à la liberté de
conscience dès lors que cet enseignement obligatoire s’accompagnait de la faculté, pour
les parents, de solliciter une dispense d’assiduité (Conseil d’État, 6 avril 2001, SNES,
Lebon, page 170).

Article L 141-2 :

Suivant les principes définis dans la Constitution, l’Etat assure aux enfants et adolescents dans les établissements publics d’enseignement la possibilité de recevoir un enseignement conforme à leurs aptitudes dans un égal respect de toutes les croyances.
L’Etat prend toutes dispositions utiles pour assurer aux élèves de l’enseignement public la liberté des cultes et de l’instruction religieuse.
La jurisprudence s’attache au respect, tant de la neutralité des manuels scolaires (Conseil d’État, 20 janvier 1911, Porteret, Lebon page 69, Conseil d’État 14 janvier 1916, Association des pères de famille de Gamarde-les-Bains, Lebon page 30) qu’à la neutralité des programmes (Conseil d’État, 2 novembre 1992, M. Kheroua et autres, Lebon page 389).
Par ailleurs, le Conseil d’État est amené à considérer que le développement d’une
éducation à la sexualité ne méconnaissait ni le principe de neutralité ni le principe de
laïcité, dès lors que son objet ou sa portée ne tendaient pas à affecter les convictions
religieuses des élèves, de leurs parents ou des enseignants (Conseil d’État, 18 octobre 2000, association Promouvoir, Lebon page 424).

La volonté de respecter toutes les croyances et d’assurer aux élèves de l’enseignement public la liberté de culte et d’instruction religieuse a notamment conduit à se préoccuper de la question particulière de la restauration scolaire ou d’éventuelles autorisations d’absences pour motif religieux.

L’interdiction du port par les élèves de signes d’appartenance religieuse
Article L 141-5-1 :

Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit.
Le règlement intérieur rappelle que la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire est
précédée d’un dialogue avec l’élève. Cet article a été introduit dans le Code de l’éducation par la loi du 15 mars 2004, à la suite du débat engagé, à partir de 1989, sur le port par des élèves de signes d’appartenance religieuse.
Il clôt, temporairement, la question dite du « voile islamique ».

Avant l’intervention de ce texte, le Conseil d’État, dans un avis émis le 27 novembre
1989 à la demande du ministre de l’Éducation Lionel Jospin, avait établi que le port de
signes d’appartenance religieuse, qui relève de la liberté d’expression des élèves, n’était pas incompatible avec le principe de laïcité, mais qu’il ne devait pas constituer un acte de prosélytisme ou être arboré de façon ostentatoire, ce qui aurait porté atteinte à l’ordre public au sein des établissements scolaires. « Le port par les élèves de signes par lesquels ils entendent manifester leur appartenance à une religion n’est pas, par lui-même, incompatible avec le principe de laïcité, dans la mesure où il constitue l’exercice de la liberté d’expression et de la manifestation de croyances religieuses, mais que cette liberté ne saurait permettre aux élèves d’arborer des signes d’appartenance religieuse qui, par leur nature, les conditions dans lesquelles ils seraient portés individuellement ou collectivement, ou par leur caractère ostentatoire ou revendicatif, constitueraient un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de propagande, porteraient atteinte à la dignité ou à la liberté de l’élève ou d’autres membres de la communauté éducative, compromettait leur santé ou leur sécurité, perturberaient le déroulement des activités d’enseignement et le rôle éducatif des enseignants, enfin troublerait l’ordre dans l’établissement ou le fonctionnement normal du service public. »

Par ailleurs, le Conseil d’État avait souligné que les appartenances religieuses des élèves ne pouvaient les conduire à méconnaître l’obligation d’assiduité.
À la suite de cet avis, un certain nombre d’arrêts sont intervenus, au travers desquels le Conseil d’État a été amené à annuler les dispositions de règlements intérieurs
d’établissements qui interdisaient de façon générale et absolue le port de tout signe
d’appartenance religieuse, tout en veillant scrupuleusement, au cas par cas, à vérifier le caractère éventuellement ostentatoire ou prosélyte du comportement des élèves (CE 2 novembre 1992, M. Kherouaa et autres R. 389 ; 27 novembre 1996, M et Mme Naderan, R.463, 9 octobre 1996, ministre de l’Éducation nationale c/ Unal).

Tant l’avis du Conseil d’État que les nombreuses décisions juridictionnelles qui
intervinrent ultérieurement donnèrent lieu à de nombreuses prises de positions de la
doctrine.
Le vote de la loi a été précédé par le dépôt du rapport de commission Stasi, au mois de décembre 2003, l’intervention d’une législation sur le port de signes d’appartenance
religieuse constituant l’une des préconisations formulées pare la commission dans son rapport.
Le principe d’interdiction formulé par la loi a été considéré comme de nature à fixer une règle objective à laquelle peuvent se référer les chefs d’établissement, éclairés par la circulaire d’application de la loi du 15 mars 2004.

Toutefois, des sanctions ne peuvent être prises que si s’est instauré un dialogue
préalable.
Les juridictions administratives ont considéré que le dialogue préalable avait un caractère obligatoire (TA Cergy Pontoise, ordonnance 21 octobre 2004, M. Bikramjit Singh, Requête N° 0407980).
Au travers de divers arrêts récents, la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé la compatibilité de l’interdiction posée par la loi du 15 mars 2004 avec le principe de la liberté religieuse (CEDH 4 décembre 2008, Drogu c/ France, n° 27058/05 AJDA 2008. 2311, CEDH 4 décembre 2008 Kervanci c / France, RDP 2009.916, obs. G. Gonzales).

Elle a étendu au cas français les principes qu’elle avait eu l’occasion de poser dans son arrêt du 10 novembre 2004 dans le contexte de la laïcité turque (CEDH Grande Chambre 10 novembre 2005, n° 44774/98, AJDA 2006. 315, note G. Gonzalez). Le 30 juin 2009, dans un arrêt aux accents d’arrêt de principe, le Cour a confirmé la conventionnalité de la loi (CEDH 6 juin 2009, Mlle Tuba Aktas c/ France, n° 43563/08, AJDA 2009. 2077, note G. Gonzalez). Le Conseil d’État, dans un arrêt rendu le 6 mars 2009 (CE, 6 mars 2009 : Mme Akremi, n°30776, AJDA 2009, p. 1006) a, dans le même esprit, jugé que l’exclusion définitive d’une élève pour le port d’un foulard islamique n’était pas contraire à la Convention européenne des droits de l’homme.
Il convient enfin de préciser que le texte ne s’applique qu’au sein des établissements
d’enseignement public, les établissements d’enseignement privé n’y étant pas soumis.
Une circulaire du 22 mai 2004 (voir document joint) est venue préciser les conditions d’application de cet article de loi.

Concernant la question de la restauration scolaire,
le Conseil d’État a été amené à confirmer une approche souple du principe de la laïcité, partant du principe que la cantine scolaire était un service facultatif.
Cependant, dans une ordonnance en date du 25 octobre 2002 (Mme Renault, requête n° 251.161), le Conseil d’État a confirmé une ordonnance du tribunal administratif de
Marseille en date du 2 octobre 2002 à la suite d’une requête formulée par une personne qui se plaignait que la commune d’Orange faisait systématiquement figurer du poisson dans les menus du vendredi et non pas de la viande.
Concernant les autorisations d’absences, la liberté de conscience dont disposent les
élèves se traduit par le droit de manifester leur croyance religieuse à l’intérieur des
établissements scolaires, sans toutefois que ceux-ci puissent porter atteinte aux activités d’enseignement compte tenu des programmes, et à l’obligation d’assiduité.

Ainsi, des refus d’autorisation d’absence pour motif religieux peuvent-elles être
considérées comme régulières dès lors qu’elles se fondent sur les nécessités d’un
développement des études (Conseil d’État, Assemblée, 14 avril 1995,
Centrale des israélites de France, Lebon, page 171).
Le Conseil d’État admet que les élèves des établissements publics d’enseignement du second degré puissent bénéficier individuellement d’autorisations d’absences nécessaires à l’exercice d’un culte ou à la célébration d’une fête religieuse dans le cas où précisément ces absences sont compatibles avec l’accomplissement des tâches inhérentes à leurs études et à l’ordre public scolaire.

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