Monsieur le Directeur, Monsieur le Président, Mesdames Messieurs,

C’est donc depuis Marseille que le chef de l’État a fait des annonces pour l’École, une École du futur ouverte à toutes les dérives et dérégulations, une École où l’individualisation des parcours devient la norme. L’ensemble des annonces qui pourrait d’ailleurs s’apparenter à une circulaire de rentrée écrite depuis l’Élysée, n’a fait l’objet d’aucune concertation avec les représentants des personnels. Rien de surprenant après tout, ces mesures présidentielles s’adressent bien davantage à une frange de l’opinion publique et des parents d’élèves, sans se soucier un seul instant des personnels de l’Éducation nationale, toutes missions confondues, sommé.es d’appliquer la volonté d’un seul homme. Cette brutalité dans la méthode est révélatrice une fois de plus du mépris dans lequel sont tenus les personnels.

En plus d’une communication verticale et autoritaire, les annonces depuis Marseille dessinent une École profondément repensée dans un cadre idéologique cohérent, libéral, mais totalement incompatible avec les principes d’égalité, de laïcité, de gratuité de l’École républicaine, une École publique soucieuse de l’accès aux savoirs émancipateurs pour tous les jeunes quels qu’ils soient et où qu’ils soient.

Au prétexte de lutter contre les inégalités, toutes les déréglementations, tous les débords du cadre national seront donc autorisés sur la base de projets prétendument « innovants », quitte à mettre les établissements en concurrence, quitte à retirer des moyens à l’Éducation prioritaire pour développer les contrats locaux d’accompagnement et autres cités éducatives, quitte à pressurer les personnels pour qu’ils en fassent encore plus en multipliant sans compter les projets éligibles au Pacte. Ce nouveau genre de gouvernance vise à transformer nos métiers, des métiers standardisés, normés, contrôlés. Il fait bien peu de cas de la charge de travail des personnels, des personnels qui s’épuisent à faire réussir leurs élèves dans des classes en sureffectifs. Mais l’apprentissage des élèves dans la classe, ce geste professionnel qui est le cœur de nos métiers, est bien difficile à incarner et à valoriser pour un président qui ne porte pas les ambitions originelles de l’École publique.

Pour impressionner, il est facile d’annoncer des collèges ouverts de 8 à 18h même si beaucoup le sont déjà. Développer en réalité de l’animation récréative en favorisant l’entrisme d’associations ne permettra pas de mieux faire réussir les élèves. Pour le SNES-FSU, il faut bien au contraire étendre le temps des apprentissages à 32h hebdomadaires en diversifiant les modalités d’enseignement et d’accompagnement des élèves, dans la classe avec leurs enseignant.es. Le président Macron s’est d’ailleurs bien gardé d’aborder les moyens et les dotations en heure d’enseignement qui permettraient véritablement de travailler autrement avec les élèves. Il préfère favoriser l’entrisme d’associations, d’officines voire d’entreprises dans les EPLE pour occuper, au mépris de la neutralité du service public, un jeune public captif.

Pour le SNES-FSU le temps scolaire n’est pas un tabou, mais céder à une forme de populisme sur les vacances scolaires est méprisant pour les personnels qui sont soit mobilisés par les examens jusqu’à début juillet soit en cours, à la recherche d’activités qui gardent du sens pour des élèves déjà démobilisés fin mai. Alors que l’absentéisme des élèves après les épreuves de bac en mars est le fléau du lycée Blanquer, instrumentaliser la désorganisation du troisième trimestre relève de la provocation. Pour le SNES-FSU, repousser les épreuves de spécialité en juin, et retarder les conseils de classe et les procédures d’orientation en collège sont les premières mesures qui s’imposent pour regagner du temps d’école.

Quoique la note de service sur la Découverte des métiers au cycle 4 laisse une marge d’autonomie aux équipes pour déployer le nouveau dispositif, le chef de l’État nous apprend qu’une demi-journée tous les quinze jours y sera consacrée. Qui faut-il donc croire ? Chacun aura noté que les familles des quartiers de l’éducation prioritaire doivent se réjouir de cette nouvelle opportunité. Pour le chef de l’État, ces jeunes plus fragiles vont pouvoir découvrir des métiers, désertés, précarisés, sur lesquels se projeter au lieu de s’imaginer un avenir plus ambitieux au lycée.

Le SNES-FSU conteste cette vision de l’École où les formations sont pensées pour les besoins à court terme de l’économie locale, cette vision qui rend chaque élève responsable de ses choix et de son parcours, cette vision qui renonce à l’ambition républicaine pour tous les élèves quand toutes et tous sont capables de réussir.

Le SNES-FSU rappelle son opposition à la découverte des métiers, un dispositif en tout point articulé et cohérent avec la réforme de la voix professionnelle que nous combattons.

Au travers du Pacte enseignant contre lequel le SNES-FSU mobilise avec succès la profession, se redessinent nos métiers pour que les personnels courbent l’échine et s’accommodent des orientations qui vont à l’encontre de l’intérêt général. Le SNES-FSU poursuivra dès la pré-rentrée ses actions pour obtenir la revalorisation de nos métiers et des salaires et pour faire entendre que l’unité du second degré est une garantie d’accès aux savoirs pour toute la jeunesse. Dans le prolongement des actions unitaires contre la réforme des retraites, les nombreuses expressions intersyndicales et inter-organisations que nous avons pu construire ces derniers mois, tout particulièrement au CSE, laissent entrevoir une capacité collective à résister et à porter un autre projet pour l’École.