Pour rappel, le guide de l’inspection générale avec ses déclinaisons disciplinaires n’a aucune
portée réglementaire : son contenu ne peut pas être imposé aux collègues et il doit être considéré
comme une ressource disciplinaire parmi d’autres. Les seuls textes réglementaires (décret, arrêté
et dans une moindre mesure la note de service) ne comportent aucune mesure contraignante sur les
modalités d’évaluation. Une grande vigilance s’impose donc au moment de la rédaction du PLE
pour ne rien se laisser imposer. En complément de cette analyse disciplinaire, le SNES-FSU a
publié un guide très complet qui vous permettra d’analyser toutes les informations pour agir
collectivement. 

Le guide ministériel présente des recommandations de divers ordres, mais globalement, tout en
s’inscrivant dans l’existant, elles entendent amener les collègues à aller au-delà des pratiques
actuelles d’évaluation. Le rappel global sur les différentes formes d’évaluation se contente de les
identifier, mais n’aborde pas les effets de la transformation de fond créée par cette manière tout à
fait nouvelle de « fabriquer » une note d’examen, à vocation donc certificative, pas plus qu’il ne
fournit des éléments de réflexion en profondeur sur l’articulation avec les autres modalités
d’évaluation, le rapport des élèves à la note, etc. Il en découle un guide dont ne ressortent
finalement que des prescriptions, plus ou moins lourdement suggérées.


Un cadre général qui joue sur le flou

En préalable, le SNES-FSU rappelle que ce cadre que présente le guide ministériel n’est qu’une
réponse aux problématiques du Contrôle continu … pour les enseignements qui sont concernés ! Or,
sauf cas d’abandon en fin de Première, la Spécialité Mathématiques est évaluée en mars de l’année
de Terminale sur épreuves nationales, et donc hors du champs d’application du calcul de la note de
Contrôle continu. Le SNES-FSU appelle à avoir celà en tête lors des réflexions au sein des équipes :
malgré les apparences du guide ministériel, ne sont concernés que le tronc commun de la voie
technologique et, le cas échéant, la Spécialité Mathématiques de la voie générale pour les élèves qui
l’abandonneront en fin de Première…

Plusieurs zones d’ombres sont à peine effleurées par le guide, notamment sur les deux options de
Terminale, les filières technologiques industrielles. Rien n’est dit sur l’évaluation de l’enseignement
scientifique, qui pose particulièrement problème pour les mathématiques, dont les temps
d’apprentissage, déjà réduits à leur plus simple expression (le plus souvent au mieux 0,5h
hebdomadaires avec les élèves !), risqueraient de se réduire encore si on leur étendait les réflexions
formulées par ailleurs dans le guide. La concertation avec les collègues de SVT et Physique-Chimie
intervenant n’est même pas évoquée par le guide, ce qui incite à penser que cet enseignement ne
constituait pas la priorité de l’inspection : est-ce vraiment une surprise ?

Il n’est enfin fait aucune distinction entre les formulations concernant la spécialité Mathématiques
de la voie générale, et les enseignements du tronc commun de la voie technologique : c’est
étonnant, les attentes en termes de maîtrise des outils et de compétences visées n’étant pas
nécessairement les mêmes, et en tout cas pas avec le même poids dans la formation suivie.

Du classique et du « moderne » …

Deux axes principaux structurent le cadre proposé, applicable donc aussi bien à la voie générale qu’à la voie technologique :

  • une incitation assez forte à diversifier les types d’évaluations proposées, sur des critères de réussite qui restent flous : capsules audio produites par les élèves (leur faisabilité comme leur rapport avec ce qui peut être demandé en mathématiques paraît extrêmement éloigné de la réalité) ; prestations orales (à l’occasion de l’exposé oral de la solution d’un exercice ou rédaction d’une preuve esquissée en classe par exemple). On relève le retour des exercices à prise d’initiative – dont la réforme du lycée avait pu laisser penser qu’ils passaient au second plan –, ce type d’évaluation restant toujours délicat à mettre en œuvre, et très déstabilisant pour les élèves. Les QCM sont envisagés, dans le cadre d’une restitution de connaissances, mais aussi – et c’est nouveau – dans une perspective d’évaluation de compétences (le guide mentionne d’ailleurs la difficulté de bien les construire dans ce cas, en faisant mention des pratiques de la DEPP en la matière) : il n’est pas sûr que ces précautions oratoires éclairent concrètement les collègues ;
  • un travail d’harmonisation renforcé. Ainsi, le cadre fortement suggéré passe par des outils d’évaluation (sujets, barèmes, etc.) communs – en nombre sans doute supérieur à ce qui se pratique déjà, voire à ce que peuvent permettre les contraintes des établissements – ; des barèmes plus valorisants et plus « fluides » (le ¼ de point serait à éviter car pas assez impactant à la hausse).

A travers ces deux axes, le Ministère vise bien une transformation des pratiques enseignantes, sans proposer aucune formation, ni recul solide. Il s’agit aussi d’avoir l’air de préparer le Grand Oral, alors que cet exercice est conduit dans un cadre assez différent de celui du cours de mathématiques (absence de tableau au Grand Oral, de matériel de projection, de modélisation, de calcul, etc.).
Le cadre proposé impose pratiquement un minimum de 2 devoirs « sur table » par trimestre ou 3 par semestre ce qui est probablement déjà très largement répandu, mais surtout des modalités communes de fabrication de la note de contrôle continu, portée sur les bulletins. Coefficients, types d’évaluations diversifiées intégrés, etc. doivent être prévus et annoncés en amont, au moins à l’échelle du niveau et pour toute l’année. Cela peut entrer en contradiction avec la liberté pédagogique, et plus surtout élimine les possibilités de modulations pour tenir compte du public réellement scolarisé en cours d’année, ou de l’évolution d’un groupe-classe particulier. Ce carcan défini à l’aveugle, tout en étant relativement difficile à rectifier pour l’année suivante – si tant est qu’il soit pertinent de modifier un cadre d’évaluation chaque année… – peut s’avérer rapidement ingérable en pratique. Il présente de plus le risque de cadrer de manière ferme des progressions communes, qui ne sont en rien obligatoires.
Les pistes suggérées font totalement l’impasse sur la réalité du fonctionnement d’un lycée, avec ses contraintes matérielles : salles, temps banalisés, etc. Les E3C avaient pourtant démontré la difficulté de réunir toutes les conditions de parfaite organisation pour la tenue de devoirs communs ! Enfin, le document ne propose aucune piste spécifique pour répondre à la problématique des élèves absents à un devoir, ou des stratégies d’évitement, renvoyant à un cadre plus général évoqué dans le préambule, mais qui demeure un réel problème dans le quotidien des classes : ce sera aux collègues d’inventer les réponses, mais sans doute dans une approche transdisciplinaire qui ne leur facilitera pas le travail et ne tiendra guère compte des spécificité de la discipline.

Le SNES-FSU recommande la plus grande prudence dans l’intégration des formes diversifiées d’évaluation : elles peuvent sans doute être tentées, mais les intégrer d’emblée aux pratiques de toute l’équipe et les annoncer en amont aux élèves comme constitutives dans la note finale peut s’avérer périlleux suivant les pratiques des uns et des autres et les habitudes des élèves en la matière. Il semble raisonnable de les écarter dans un premier temps, tant qu’elles ne font pas l’objet d’une expertise individuelle et commune dans l’équipe.

Il faut rester le plus général possible permet de se prémunir d’évolutions des pratiques d’évaluations qui seraient rendues nécessaires par l’évolution et les progrès des élèves, et se rappeler que rien ne peut imposer des progressions communes totalement figées.

Concernant la multiplication des cadres communs d’évaluation, leur faisabilité n’a probablement pas été prise en compte dans la constitution des emplois du temps (et pour cause cette année, mais il n’est pas sûr que les contraintes établissement des années à venir le rende davantage réaliste), et aucun temps spécifique n’est dévolu aux équipes pour mener ce lourd travail en commun à plusieurs reprises dans l’année : les succès de l’organisation des E3C a démontré que, même anticipées, ces difficultés étaient de redoutables obstacles. Ces derniers ayant conduit le ministère à leur suppression « de bon sens », il ne saurait être question de les réinventer, et encore moins avec la charge, pour les équipes de professeurs, de les gérer.

Deux options de Terminale dans le même sac

Un très court paragraphe concerne à la fois les options Mathématiques de Terminale générale, pour demander la plus grande bienveillance : l’évaluation « ne doit pas être pénalisante (…) et valoriser les acquis supplémentaires et le recul » procurés par le suivi de l’option. Le faible coefficient accordé à ces options (2 sur 102 à chaque fois) explique peut-être cette volonté, mais cela rend délicat la conduite de l’évaluation, qui peut dès lors aussi renvoyer une image faussée du niveau réel de l’élève – notamment en Mathématiques Complémentaires -, et ne l’aide pas à se positionner avec objectivité dans le cadre d’une poursuite d’étude où les Mathématiques peuvent avoir un poids important, aussi bien dans le recrutement que dans le quotidien de la filière visée.

La différence de profil entre des élèves suivant l’option Mathématiques Expertes et ceux suivant l’option Mathématiques Complémentaires n’est pas évoquée dans ce court paragraphe. Gageons que les collègues auront probablement des pratiques d’évaluation assez différentes dans ces deux options compte tenu de leurs finalités assez différentes, ce que le guide ministériel choisit d’ignorer !

Contorsions en vue et zones d’ombres dans la voie technologique

Un paragraphe spécifique, enfin, concerne la spécialité Physique-Mathématiques en STL, mais n’est pas étendu à son pendant en STI2D, filière pour laquelle rien de spécifique n’est dit quant aux Mathématiques.

Vu le cadre réglementaire de l’examen, ce paragraphe est en réalité sans objet, puisque la spécialité Physique-Mathématiques n’est pas abandonnée en fin de Première : se poursuivant en Terminale, elle y fait l’objet d’une évaluation «  terminale  » en mars, et ne compte donc pas pour le contrôle continu : un cadrage de l’évaluation en interdisciplinarité de cette spécialité au fil du cycle ne saurait donc exister !

Malgré cela, c’est bien ce que le guide ministériel tente de faire, profitant de l’occasion qui se présente ! On découvre ainsi un nouveau cadre d’évaluation, introduisant évaluation « du troisième type », interdisciplinaire avec la Physique, dans laquelle les Mathématiques entreraient pour 30% du poids de l’évaluation.
Outre la nécessité d’un travail suivi avec les collègues de Physique qui s’imposerait, et la difficulté de concevoir des sujets qui mélangent les deux disciplines sans être totalement artificiels (les sujets 0 du printemps 2021 produit par le Ministère en témoignent  !), cette évaluation telle que suggérée n’a probablement rien à voir avec ce que les sujets 0 publiés pour la Terminale laissent penser. Le guide semble accréditer l’idée que la partie mathématiques du programme de Spécialité ne serait à évaluer, dans le cadre d’un sujet commun, que sur des compétences de modélisations, raisonnement et capacités d’utilisation du calcul numérique. On s’éloignerait ainsi nettement du contenu de sujets 0 et du contenu mathématique de cette spécialité, censé fournir aux élèves des outils plus avancés et des approfondissements disciplinaires qui relèvent de pures connaissances et de techniques relativement avancées.

Le SNES-FSU estime raisonnable de ne pas entrer dans ce montage, inutile puisque ne comptant pas pour le contrôle continu, complexe, et chronophage : s’en tenir à des évaluations spécifique à chaque discipline paraît répondre au cadre réglementaire de l’examen.
Dans tous les cas, et sur le seul volontariat des équipes disciplinaires, seul un nombre extrêmement limité d’évaluations communes aux deux disciplines pourrait être envisagé, par exemple à l’occasion d’un seul devoir de fin d’année associant les deux disciplines, et centré, pour la partie mathématique, sur la détection de capacités à analyser des résultats par exemple obtenues à l’aide d’outils numériques, sur la manière de les obtenir, sur la modélisation d’un phénomène. Ceci n’a évidemment de sens que si les élèves y ont été entraînés, et ne peut venir qu’en aboutissement d’un travail des deux équipes disciplinaires assez fin, qu’il est le plus souvent impossible de faire faute de temps de concertation et de travail en commun dédié dans les services…
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