Le rapport remis le 18 juillet confirme la volonté gouvernementale de créer un régime de retraites unique fonctionnant par points. L’âge légal de départ serait maintenu à 62 ans mais un âge de taux plein serait créé à 64 ans, avec 5% de décote par année manquante. La valeur d’achat du point serait fixée à 10 euros et celle de service à 0,55 euros annuels pour une liquidation de sa pension à l’âge du taux plein, fixé à 64 ans. Sur l’évolution de la valeur de service du point une fois que le nouveau régime serait en place, deux mécanismes sont cités, créant incertitude et opacité : • La valeur de service pourra varier en fonction de l’évolution des paramètres économiques et démographiques ; • L’âge de taux plein pourra être reculé, faisant varier de fait la valeur du point (par exemple, en cas de recul d’un an, les 0,55 euros ne seraient plus obtenus à 64 mais à 65 ans) Le SNES avait déjà publié en mai dernier sur son site les simulations en utilisant les données des régimes complémentaires Arrco et l’Agirc. Actualisées avec les nouveaux paramètres, elles montrent une dégradation encore plus importante pour la retraite calculée en intégrant la totalité de la carrière.
Projet Retraite par points Calcul actuel avec le code des pensions
Pension mensuelle brute Taux de remplacement du dernier salaire avec 10 % de primes sur toute la carrière Pension mensuelle brute Taux de remplacement du dernier salaire avec 10 % de primes sur toute la carrière Taux de liquidation classique
43 ans de carrière 1932,64 € 45,67 % 2 885,42 € 68,18 % 75,00 %
Perte de 952,78 € par mois soit une pension amputée de 33,02 %
40 ans de carrière 1755,92 € 41,49 % 2 281,49 € 53,91 % 59,30 %
Perte de 525,57 € par mois soit une pension amputée de 23,04 %
38 ans de carrière 1638,11 € 38,71 % 1912,43 € 45,19% 49,71 %
Perte de 274,32 € par mois soit une pension amputée de 14,34 %
Avec une carrière de 43 ans, la pension est amputée de 950 euros, 525 euros à 40 ans de carrière et près de 275 euros pour 38 ans de carrière. La pension actuelle calculée avec la décote maximale de 25% aboutit à un taux de liquidation juste au-dessous de 50 % donc déjà fortement dégradé par rapport au taux plein de 75 %. Or avec un système par points, on aboutit pour une même carrière à un taux de 38,6 % de l’ensemble des rémunérations, primes comprises, et donc une perte de 275 euros par mois ! Toutes ces projections montrent que la prise en compte des primes n’est absolument pas une compensation de la perte subie, en particulier dans des corps ayant peu de primes. Pour les professeurs des écoles, les professeurs documentalistes, les CPE, les PSY-EN, la perte serait encore pire puisque nous avons pris ici une moyenne de 10 %, le taux de primes pour ces corps est beaucoup plus bas, autour de 4 %. Détails du calcul : Pour les corps de certifiés, PE, CPE, PEPS, PSY-EN, etc, dont la carrière en classe normale est parcourue en 26 ans avec un passage à la hors-classe obtenue après 6 mois au 11ème échelon. La carrière est donc estimée se terminer au nouveau 7ème échelon de la hors-classe (indice 821) avec une ancienneté dans cet échelon allant ainsi de 3,5 ans à 8,5 ans. On considère que le salaire est composé de 10 % de primes sur toute la carrière (c’est déjà un taux de primes élevé, il correspond par exemple pour un certifié au fait d’avoir une heure supplémentaire et une indemnité de professeur principal sur quasiment toute les années de sa carrière). Dans le projet par points, on est censé cotiser sur la totalité de la rémunération à hauteur de 28,12 %. Le calcul est effectué sans paramètre lié à l’âge de départ. Calcul fait sur la base d’une cotisation utile pour acquérir des points de 25,31 % (90 % de 28,12 % annoncée) répartie entre le salarié (40 %) et l’employeur (60 %) et où le rendement instantané du point est de 5,5 %. Quelles règles d’indexation du point lors de la vie active et à la retraite ? Dans ce nouveau système de retraite à rendement défini en points, l’indexation de la valeur d’achat et de la valeur de service du point doit être identique et censer ainsi permettre de respecter le principe de l’équilibre actuariel entre cotisations et prestations. Le haut-commissaire dans son rapport juillet voudrait se donner pour règle de permettre à chaque génération de bénéficier d’un taux de rendement de ses cotisations égal à celui du revenu moyen par tête (RMPT) pendant son cycle de vie tout en précisant aussitôt que « la bascule vers une règle d’indexation plus favorable qu’auparavant (sur les prix depuis 1987) ne pourra se faire immédiatement ». S’ajoute aussi une autre règle pour les promoteurs d’un tel système c’est qu’il doit y avoir la prise en compte de l’espérance de vie à la retraite au moment de la liquidation conduisant pour le HCRR à une décote du rendement (-10 % à 62 ans). Le rendement de 5,5 % indiqué dans le rapport est celui prévu à 64 ans ! Et pourtant ce rendement ne détermine pas à lui seul le montant de la pension correspondante. En effet, deux régimes de retraite avec des rendements identiques peuvent aboutir à des montants différents, notamment en cas d’indexation uniquement sur les prix ou les salaires. C’est pourquoi, il est nécessaire d’associer au rendement la série des valeurs de service du point (ou des valeurs d’achat) sur une longue période afin d’évaluer le niveau des pensions avec exactitude. Le rendement instantané peut donner une fausse idée du rendement actuariel et le tableau ci-dessous montre illustre bien que pour un même rendement instantané de 5,5 % dans deux régimes, la pension perçue pour un exemple de 10 ans de cotisation avec 10 000 € cotisés est plus élevé de 6,1% dans le second cas. Le taux de remplacement n’est donc pas le même ! Une fois en retraite, les retraites ne seraient indexées que sur les prix confirmant la dévalorisation des pensions par rapport aux revenus de la population.
Indexation sur les prix (+1,5 %) Indexation sur les salaires (+1,3 % en termes réels, soit +2,8 % en euros courants)
Décomposition du rendement Décomposition du rendement
Valeur de service Valeur d’achat Rendement instantané identique pendant 10 ans Points Valeur de service Valeur d’achat Rendement instantané identique pendant 10 ans Points
0,55 € 10,00 € 5,5 % 1000 0,55 € 10,00 € 5,5 % 1000
0,558 € 10,150 € 5,5 % 985 0,565 € 10,280 € 5,5 % 973
0,567 € 10,302 € 5,5 % 971 0,581 € 10,568 € 5,5 % 946
0,575 € 10,457 € 5,5 % 956 0,598 € 10,864 € 5,5 % 920
0,584 € 10,614 € 5,5 % 942 0,614 € 11,168 € 5,5 % 895
0,593 € 10,773 € 5,5 % 928 0,631 € 11,481 € 5,5 % 871
0,601 € 10,934 € 5,5 % 915 0,649 € 11,802 € 5,5 % 847
0,610 € 11,098 € 5,5 % 901 0,667 € 12,133 € 5,5 % 824
0,620 € 11,265 € 5,5 % 888 0,686 € 12,472 € 5,5 % 802
0,629 € 11,434 € 5,5 % 875 0,705 € 12,821 € 5,5 % 780
Total des points 9 361 Total des points 8 859
Pension théorique pour 10 000 € cotisés sur 10 ans 5 886 € Pension théorique pour 10 000 € cotisés sur 10 ans 6 247 €
Lecture : En 10 ans, la pension perçue avec 9 361 points donne un taux de remplacement de 58,86 % tandis que celle avec 8 859 points donne un taux de remplacement de 62,47 % supérieure au premier de 6,1% Quelle transition ? La transition se ferait sur une dizaine d’années, donc entre les générations 1963 et 1973. Si le rapport évoque « la conservation des droits acquis dans l’ancien système » jusqu’en 2025 rien ne garantit réellement ce maintien. Par ailleurs, les conditions de la conversion restent floues. Pour les fonctionnaires, l’application de la règle des 6 derniers mois pour calculer les droits acquis de tous en 2025 n’est pas explicitée. Le rapport note par ailleurs la « nécessité d’être à l’équilibre au moment de la bascule dans le nouveau régime », ce qui signifie que, d’ici 2025, de nouvelles mesures pourraient être prises (par exemple un âge pivot dès 2021). Une majoration de pension de 5% par enfant pour un seul parent ferait masse des différents droits familiaux actuellement existants. En effet, dans le nouveau système par points, les bonifications en annuités disparaîtront, de même que la majoration de pension pour 3 enfants. Le haut-commissariat confirme que cela fait perdre aux parents de 3 enfants mais prétend que cela redistribue sur tous les autres et qu’au final c’est du plus pour les droits familiaux et du plus pour les femmes. Or, en première analyse, il apparaît que les bonifications, dans le public, et les majorations de durée d’assurance dans le privé, qui permettaient d’annuler ou réduire les décotes, ne seront pas compensées par seulement 5% de majoration sur la pension des assurées. Peu de choses sont dites du nécessaire aménagement des fins de carrières, une « retraite progressive » (c’est-à-dire une liquidation partielle de sa retraite pour continuer à travailler à temps partiel) serait possible, ce qui serait une nouveauté dans la Fonction publique. Liquidation du Code des Pensions ? Le SNES s’opposera avec la FSU à toute tentative d’abandon du Code des pensions, élément du Statut et à toute individualisation de la retraite. Le premier ministre va maintenant recevoir les organisations syndicales pour « construire la méthode et le calendrier de concertation ». Il est probable que le débat parlementaire ait lieu après les élections municipales. La FSU alerte déjà sur une baisse généralisée et drastique d’une majorité des pensions dès lors que l’objectif affiché du nouveau système est de bloquer le financement des retraites à son niveau actuel alors que le nombre de retraités va augmenter. La FSU analyse dans son numéro spécial d’août les enjeux de ce projet de réforme (voir pièce jointe). Le rapport Delevoye est téléchargeable : https://www.reforme-retraite.gouv.fr/IMG/pdf/retraite_01-09_leger.pdf et ses annexes : https://www.reforme-retraite.gouv.fr/IMG/pdf/retraite_annexes_leger.pdf

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