L’arrêté du 19 mai 2015, signé au lendemain d’une grève majoritaire contre la réforme du collège 2016, et celui du 21 octobre 2015 concernant les SEGPA décrivent ce que sont les enseignements complémentaires et définissent les grilles horaires du collège et de la SEGPA.

Les arrêtés modificatifs du 7 avril publiés au journal officiel du 13 avril 2023 ne modifient en rien l’organisation des enseignements complémentaires préexistants (EPI, AP), d’ailleurs tombés en désuétude dans de nombreux collèges.

De nouveaux enseignements

En revanche, ils créent deux nouveaux enseignements complémentaires rendus obligatoires pour les élèves de Sixième :

  • « a) Pour tous les élèves des classes de sixième, une heure hebdomadaire de soutien ou d’approfondissement en français ou en mathématiques en fonction de leurs besoins. Cette heure est organisée sous forme de sessions d’enseignement obligatoires en interclasse dont la composition est révisée au moins chaque trimestre. »
  • « b) Pour tous les élèves des classes de sixième, l’accompagnement aux devoirs. Le chef d’établissement fixe l’organisation et le volume horaire de ce dispositif qui s’applique à tous les élèves. » Il s’agit en fait du dispositif actuellement mal nommé Devoirs faits (cette appellation demeure bien pour le cycle 4), qui, tel le chat de Schrödinger, est et n’est pas à fois un enseignement dans la bouche du ministère.

Au prix d’une discipline existante

Par mesure d’économie, les dotations horaires globales (DHG) ne seront pas abondées en conséquence, mais c’est la suppression pure et simple d’une discipline qui financera le volet obligatoire du dispositif de soutien / approfondissement. C’est l’horaire de technologie qui en fait les frais. Ce choix tombe à pic pour le ministère qui organise la pénurie de professeur·es de technologie depuis la fermeture du CAPET technologie en 2012.


Comme cet horaire était globalisé avec celui des sciences en Sixième, la grille horaire est modifiée comme suit. La ligne « sciences et technologie 4 heures » devient « SVT physique-chimie 3 heures » pour la Sixième en collège. L’appellation « sciences et technologie » demeure en SEGPA car elle est utilisée aussi au cycle 4 mais dans cette ligne du tableau « 4 heures » devient « 3 heures ».

Cette suppression sèche d’une discipline contribuant à l’acquisition d’une culture commune pour organiser un dispositif hors la classe est inacceptable pour le SNES-FSU. De plus, elle désorganise a minima les équilibres qui s’étaient établis dans les collèges entre les trois disciplines globalisées. Elle fragilise des postes en créant des compléments de service, voire des suppressions de postes. Le ministère a nié cette dernière conséquence mais les retours de CSA académiques montrent qu’il y a bien des mesures de carte scolaire qui sont mises en œuvre sur le terrain. Et c’est un véritable plan social qui s’annonce pour les enseignant·es non titulaires de technologie. Pour maintenir leur poste et / ou respecter le futur programme de sciences et technologie de cycle 3, certain·es professeur·es vont enseigner une autre discipline que la leur.

Soutien ou approfondissement : le Pacte en embuscade

Dans les deux grilles apparaît une ligne supplémentaire : «  soutien ou approfondissement  1 heure ».
Il n’y a donc que le volet obligatoire de ce dispositif qui soit financé par la DHG avec l’heure qui revenait à la technologie : « Cette heure est organisée sous forme de sessions d’enseignement obligatoires en interclasse ». Si on en reste là, les groupes interclasses fonctionneront avec un effectif de classe entière, ce qui s’avère peu opérant pour ce qui concerne le soutien ! Mais ce pourrait être une solution assez répandue…

Depuis l’ouverture des négociations sur le Pacte, que l’intersyndicale a quittées en claquant la porte, la participation au « soutien ou approfondissement » en mathématiques ou en français pour les collègues de toutes les disciplines fait partie des missions liées au Pacte une fois remplies celles, prioritaires, du remplacement à l’interne et de Devoirs faits.

Mais le statut des fonctionnaires n’est pas un contrat. Pour miner notre statut protecteur, le ministère invente donc le Pacte : un contrat à signer en fin d’année pour la rentrée suivante avec le ou la chef·fe d’établissement. Dès la rentrée 2023, des professeur·es qui accepteraient de signer un Pacte s’engageraient à accomplir une ou plusieurs « brique(s) de Pacte » ! Une brique de Pacte correspondrait à une mission particulière (cela remplacerait à terme les IMP) ou bien à un lot de 24 heures annualisées face aux élèves organisées par le ou la chef·fe d’établissement. Mais attention pour accéder à une brique de Pacte de mission non obligatoire, il faut déjà avoir accepté la première brique composée de 24 heures de missions prioritaires (remplacement au pied levé et accompagnement aux devoirs-Devoirs faits). Le financement des groupes à effectif réduit de « soutien ou approfondissement » se ferait donc avec une deuxième et / ou troisième brique de Pacte pour les PLC, c’est-à-dire après avoir déjà accepté 24 heures supplémentaires devant élèves, ce qui monte à 48 ou plus les heures pactées.

Pourquoi n’est-ce pas une mission prioritaire pour les PLC ? Parce qu’un autre objectif étant de primariser le collège, il est important que des professeur·es des écoles entrent au collège. Et justement, pour les PE, le « soutien ou approfondissement » dans un collège est une mission prioritaire du Pacte.

Enfin, quel est l’intérêt pédagogique de cette création ? Ce dispositif est présenté comme une solution majeure pour résoudre les difficultés des élèves entrant en Sixième, ces élèves qui auront appris à lire et à compter avec les petits guides orange et autres préconisations dirigistes du ministère Blanquer et qui auraient donc dû obtenir de meilleurs résultats que les cohortes précédentes. Et ce sont ces mêmes méthodes qui devront être employées dans ces groupes de soutien : le travail de « compétences clés » très procédurales comme la fluence ou le calcul mental. Et comme il s’agit de trier les élèves au plus tôt, d’autres élèves auront également du temps pour approfondir leurs apprentissages. Il serait même possible, puisque ce sont des groupes interclasses, de soustraire les élèves de Sixième SEGPA à leur classe pour les disperser dans différents groupes pour lesquels l’intervenant·e ne serait pas un·e professeur·e des écoles spécialisé·e ! Au passage, tout·e professeur·e est invité·e à intervenir dans ce dispositif surtout s’il s’agit d’un·e professeur·e de technologie qui voudrait éviter un complément de service ! Le cynisme n’a pas de limite.

Il faut toujours lire les astérisques en bas de page !

Au jeu des différences, il apparaît un triple ou double astérisque dans les nouvelles grilles horaires : au total des 26 heures « s’ajoute également l’accompagnement aux devoirs ».
Là encore, c’est le Pacte qui attend les professeur·es au coin du bois. Ici, il s’agirait d’une des missions prioritaires du Pacte : il suffira d’une brique !
Dans quelles conditions ? Cela dépendra du nombre de professeur·es empacté·es. S’il n’y en a pas suffisamment alors l’accompagnement aux devoirs pourrait se faire en classe entière. C’est déjà le cas dans certains collèges à ce jour.
En séance au CSE, le DGESCO, bras droit du ministre, n’a cessé de promettre qu’une dotation spécifique serait mise à disposition sur le principe de l’allocation progressive de moyens. Toutefois, la rédaction de l’article 3 a été révisée par l’administration dans l’intervalle. La rédaction actuelle peut laisser à penser qu’il faudrait puiser encore dans les trois heures de marge d’autonomie par classe. Or on sait que les marges nationales et académiques ne cessent de fondre comme neige au soleil avec les suppressions d’emplois. Le SNES-FSU interrogera de nouveau le ministère pour éclairer ce point pour le moins flou. Et quand c’est flou…

Pour le SNES-FSU, de cette nouvelle organisation de la classe de Sixième, il n’y a rien à garder ! La réforme du collège, c’est la réforme du Pacte que le SNES-FSU appelle à refuser collectivement dans les collèges pour ne pas perdre notre statut. Pap N’Diaye a été très clair en interview, le Pacte amènera l’annualisation des services. Il faudra se saisir d’une opportunité pour résister et exiger des moyens sous forme d’heures d’enseignement : ce qui est obligatoire pour les élèves de Sixième (soutien ou approfondissement et accompagnement aux devoirs) ne l’est pas pour les professeur·es. Refusons d’être empacté·es !

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