
Les projets de programme ont été publiés sur le site du « conseil supérieur des programmes (CSP) » pendant les vacances scolaires. En voici une première analyse pour la discipline Technologie.
Un socle affiché… mais trompeur
Le projet de socle commun affiche une ambition séduisante : former des collégiennes et collégiens capables d’analyser, concevoir, réparer et questionner les objets techniques d’une société marquée par l’IA, la transition écologique et la souveraineté numérique. Mais cette promesse reste une vitrine. Car derrière l’affichage d’« émancipation », le texte organise surtout la dilution de la technologie au service de « fondamentaux » en français et mathématiques et l’introduction des compétences psychosociales (CPS). C’est inacceptable : le SNES-FSU défend la technologie comme discipline de culture commune, pas comme variable d’ajustement ni comme support de conditionnement des comportements.
Horaires sacrifiés
La suppression de l’heure de technologie en 6ᵉ coupe le parcours en deux, fragilise les apprentissages et rompt l’équité avec SVT et SPC. Elle prive aussi les élèves d’un espace indispensable pour travailler dès l’entrée au collège sur les usages numériques et les stéréotypes de genre. Dans les académies, les vies scolaires alertent déjà sur la hausse des violences liées aux réseaux sociaux en 6ᵉ : preuve supplémentaire que renforcer la technologie, et non la supprimer, est une nécessité éducative.
Des programmes intenables
Sur un volume horaire réduit, on prétend faire entrer IA, cybersécurité, éco-conception, réparabilité, programmation embarquée, CPS et culture de projet. Résultat : tout sera survolé. Ce catalogue sert davantage à cocher des cases qu’à construire des apprentissages solides. Le SNES-FSU le dit clairement : les CPS doivent être retirées du programme de technologie. Elles ne relèvent pas des disciplines.
Des moyens matériels fantasmés
Le programme de Technologie érige le FabLab en modèle idéal : imprimantes 3D, découpe laser, kits robotiques… La réalité, ce sont des laboratoires sous-dotés, sans locaux adaptés ni budgets pérennes. Les enseignant·es assument déjà l’entretien et la sécurité. L’État et les collectivités doivent financer un kit de base pour chaque collège et un budget annuel de maintenance : la vitrine ne doit pas masquer le quotidien.
Formation inexistante
IA, cybersécurité, techniques de réparation : deux journées de formation ponctuelles sont prévues pour les enseignant·es. Autant dire aucune montée en compétence sérieuse. Le SNES-FSU exige un véritable plan national de formation continue, certifiante, avec remplacement systématique des collègues en stage. Apprendre « en marchant » n’est pas une politique de formation : c’est un abandon.
Évaluations et dilution disciplinaire
CRCN-PIX, DNB, certifications externes… La bureaucratie s’alourdit et les savoirs disciplinaires s’effacent. Imposer les CPS dans les programmes de technologie brouille les frontières et vide la discipline de sa substance.
Le SNES-FSU entend bien expurger les nouveaux programmes de technologie : le rôle des professeur·es est de transmettre des savoirs émancipateurs, pas de modeler les comportements.
Nos revendications
- Rétablir l’heure de technologie en 6ᵉ, pour restaurer la cohérence du parcours, préserver les postes et travailler dès l’entrée au collège sur les usages numériques et les stéréotypes de genre, pour contribuer à l’égalité femmes-hommes.
- Supprimer les CPS des programmes de technologie : Les CPS doivent être supprimées des programmes disciplinaires. Le mal-être des élèves est réel, mais il appelle d’autres réponses : du temps, des moyens, et surtout le renforcement des personnels médico-sociaux dans les établissements.
- Doter chaque collège d’un kit FabLab de base financé par l’État et les collectivités, avec un budget annuel de maintenance.
- Déployer un plan national de formation certifiante couvrant prototypage, IA appliquée et cybersécurité, avec remplacement systématique des collègues en stage.
- Fixer un effectif maximal de 20 élèves dès qu’il y a manipulation, sur le modèle des TP de sciences expérimentales.
- Alléger le cadre évaluatif en réduisant le nombre d’indicateurs et de certifications simultanées.
- Refuser le technocentrisme MEI inchangé : la logique « matière-énergie-information » prépare surtout aux sciences de l’ingénieur et ne construit pas la « culture technique commune »
- Revaloriser la discipline : aligner l’indemnité de laboratoire sur celle des sciences expérimentales, lancer un plan de titularisation pour résorber les postes vacants, et surtout rétablir un CAPET spécifique de technologie.
En conclusion
Sans horaires suffisants, sans équipements, sans formation, et en grevant la discipline de missions qui ne sont pas les siennes, le projet actuel condamne la technologie à n’être qu’un affichage. Pour le SNES-FSU, la culture commune ne peut se construire sans une solide formation technologique, adossée à une discipline pleine et entière. Nous porterons avec force cette exigence et ferons évoluer des textes qui tournent le dos aux besoins des élèves comme aux missions des enseignant·es.
En vous syndiquant au SNES-FSU, vous pourrez participer, si vous le souhaitez, à des stages, des journées de réflexion disciplinaire (date à venir) ouvrant droit à des autorisations d’absence.
Vous pouvez également être inscrit·e sur la liste de discussion disciplinaire où chacun·e peut exprimer son point de vue, sans regard hiérarchique. Cela vous permet de poser vos questions, d’échanger avec des collègues sur les questions pédagogiques et didactiques qui traversent votre discipline, sur les conditions d’exercice. Il suffit de demander votre inscription sur la liste modérée de diffusion Techno du SNES-FSU, en envoyant un courriel à techno@snes.edu