Le vendredi 3 mai, la ministre de l’Éducation nationale a réuni tous les acteurs de la communauté éducative pour lancer la « Grande concertation » sur le respect de l’autorité à l’École dans la foulée du plan annoncé par Gabriel Attal. Les premières déclarations du Premier ministre, à Viry-Chatillon, avaient tracé les lignes d’un projet dangereux et inquiétant pour l’avenir de la jeunesse. Sans surprise, elles sont confirmées.

Vous avez dit concertation ?

Dans un troublant parallèle avec la méthode éprouvée dans la séquence « Choc des savoirs », le Premier ministre a donné huit semaines pour aboutir à des conclusions, en grande partie déjà énoncées dans le discours de Viry-Chatillon. Notons que, lorsque la séquence « Choc des savoirs » devait se terminer le jour des résultats de Pisa, les conclusions de celle sur « la violence des jeunes et l’autorité » devront être rendues…au lendemain des élections européennes. Certainement tout, sauf un hasard pour un premier ministre obnubilé par la construction de sa stature politique personnelle.

Dans l’Éducation nationale, tout commence par une présentation, en visio, par la ministre, de la méthode et des enjeux de ce dossier pour l’École. Et pour commencer, la barre est placée très haute dans l’épreuve « illusions du dialogue social » : un live sur YouTube, sans aucune interventions possibles, avec un tchat désactivé ne permettant donc aucun commentaire.

Puis, la rectrice de Bordeaux, une des co-rapporteurs de cette mission, précise le calendrier :

  • les DASEN travaillent avec leurs équipes dès la fin de la visio et doivent rendre des premières conclusions le… 8 mai (soit 5 jours, dont un week-end et un jour férié)
  • Les rectrices et les recteurs doivent rendre leur copie à la ministre le 13 mai
  • Les organisations syndicales devraient être entendues le 15 mai
  • la ministre rendra ses premières conclusions le 20 mai

Heureusement que la rectrice a précisé 4 fois que le calendrier était « serré » et « contraint ». Encore une fois, on retrouve le sens très particulier du dialogue social par l’exécutif : un calendrier serré, des propositions fermées…tout est fait pour vider de son sens le concept de démocratie sociale. Un petit jeu dangereux et irresponsable à l’heure où notre démocratie traverse une crise profonde.

Dans un monde parallèle, l’état de l’École

Les prises de parole des intervenants invités par la ministre ont détonné. Alors que le Premier ministre ne jure que par l’autorité et l’ordre, ils ont présenté tour à tour des éléments pour le moins orthogonaux avec les déclarations de Gabriel Attal : faire primer des approches éducatives sur les approches punitives, améliorer le climat scolaire, pointer les résultats des études PISA et Talis sur le quotidien en classe, les besoins en formation…mais en évitant soigneusement de mettre ces réalités en lien avec les politiques menées ces dernières années. Les suppressions d’emplois, les décisions hors sol (par exemple sur la formation continue)…c’est bien là que se trouvent, en grande partie, les origines de l’état de l’Ecole aujourd’hui et des difficultés qu’elle rencontre. Mais comme aucune intervention contradictoire n’était possible…

En 7 ans, - 8 865 emplois dans les collèges et les lycées

Gabriel Attal parle d’autorité et, en même temps, Nicole Belloubet parle d’autorité

Quant à la ministre, elle tente le grand écart en s’écartant de la tonalité du discours martial de Gabriel Attal tout en se rappelant, « en même temps », qu’elle fait partie du même gouvernement. Nicole Belloubet s’est ainsi retrouver à rappeler que l’autorité ne se décrète pas, que l’autorité n’est pas l’autoritarisme, tout en pointant la nécessité de prendre du recul sur les derniers évènements en dépassant une réaction « émotionnelle ». Un discours à la tonalité éducative, bien loin du discours aux tonalités très punitives de l’ex-ministre de l’Education nationale. En « en même temps », elle a rappelé et s’est inscrite dans le cadre donné par le Premier ministre et un certain nombre de ses mesures dont la sanction des élèves perturbateurs aux examens, qui pourraient aussi être pénalisés sur Parcoursup.

Au regard de cette visio, par certains aspects assez lunaire, sur ce sujet, comme sur d’autres, la question reste posée : y a-t-il un pilote dans l’avion Education nationale ?

Mettre au pas la jeunesse, ce n’est pas notre projet !

Derrière les questions mises en débat par la ministre (comment responsabiliser les élèves, comment mieux impliquer et responsabiliser les parents, comment faire de l’Ecole un lieu encore mieux protégé et qui protège toujours mieux), on nous renvoie rapidement vers un document « mesures à discuter dans le cadre de la concertation sur la violence des mineurs ». Sans surprise, c’est une liste des mesures annoncées par Gabrial Attal à Viry-Chatillon. On notera la subtilité de l’explication sur la mesure « se lever à l’arrivée du professeur ».

Le SNES-FSU dénonce une vision de la jeunesse et de l’éducation extrêmement simpliste et très inquiétante. La jeunesse est vue comme une classe dangereuse qu’il faut mettre au pas (en lien avec le SNU), très loin d’un projet éducatif et émancipateur pour la jeunesse.

Pour le SNES-FSU, un système scolaire et universitaire puissant est la clé de l’insertion dans la société et de l’émancipation de la jeunesse. L’école publique doit avoir les moyens matériels et humains d’assurer partout et pour tous un haut niveau d’éducation. Il faut développer des propositions pour former et qualifier tous les jeunes car toutes et tous sont capables de réussir. C’est à la fois une marque de confiance dans la jeunesse, mais c’est aussi une revendication quand trop de jeunes sont laissés de côté. Nous avons besoin de la jeunesse pour construire une société plus juste, plus écologique, plus solidaire, plus féministe !

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