En septembre 2018, la commission Manes Taylor remettait son rapport intitulé « Propositions pour une meilleure maîtrise des langues étrangères » dont a découlé un « plan d’action pour une meilleure maîtrise des langues vivantes ».
Il y est affirmé que l’exposition à la langue doit débuter le plus tôt possible et de façon régulière et que l’anglais devient obligatoire pour tous les élèves. Bien entendu, comme une sorte de réponse pédagogique « magique », le recours au numérique se retrouve à toutes les étapes, y compris dans l’évaluation. Le CECRL est encore la référence pour « inscrire le parcours de l’élève dans un cadre de référence », ce qui sous-entend que les tests et certifications jalonneront cet apprentissage, alors que de nombreux travaux de recherche ont dénoncé la dérive certificative du Cadre depuis le temps qu’il existe.


En outre le projet d’ouvertures d’écoles et établissements bilingues et internationaux est censé favoriser l’ouverture sur le monde et en dernier lieu la création d’un baccalauréat français international est destinée à « promouvoir l’excellence du modèle éducatif français dans un contexte éducatif concurrentiel ». Quid de la majorité des élèves qui sont en section « ordinaire » ?


Le 21 août 2020, un complément à ces propositions a été publié sur Eduscol.
Nous y découvrons que l’agent conversationnel « Captain Kelly » consistant en un assistant vocal doit permettre aux élèves du premier degré un apprentissage grâce à une interaction orale. Cette interaction est donc possible grâce à l’intelligence artificielle. Comment croire à des gadgets de ce type pour enseigner les langues à l’ensemble des élèves ?
Nous constatons également un recours au « testing » systématique en fin de cycle en anglais (test de positionnement en 3e et attestation en terminale) sans autre précision sur la nature réelle de ces tests ni leur coût.


Nous pouvons d’ores et déjà faire quelques remarques sur ces propositions. Tout d’abord, nous pouvons noter qu’une priorité est donnée à l’anglais, ce qui va à l’encontre de la volonté de plurilinguisme affichée. L’application Captain Kelly marque, en outre, l’entrée de l’intelligence artificielle dans l’apprentissage des langues. Cela suscite un certain nombre d’interrogations, notamment sur les protections de données, la disparition progressive de l’interaction humaine au profit de la communication avec une machine. Quel sera le rôle de l’enseignant dans ce cadre ? Ne se voit-il pas dépossédé de sa fonction ?


Le plurilinguisme est encore mis à mal avec le test de positionnement uniquement en anglais à la fin de la 3e qui aura, sans nul doute, un effet sur la motivation des élèves à apprendre sérieusement une deuxième langue et donnera lieu à une forme de bachotage. Il reste à savoir quelle sera l’utilisation ultérieure de ce test de positionnement.


Pour poursuivre dans cette même logique de certification ou attestation, les élèves des classes de terminale se verront attribuer, en plus de leur diplôme du baccalauréat, un niveau de maîtrise en langues. Il n’est pas précisé comment cette attestation sera délivrée et ni par qui. Les épreuves du baccalauréat permettront-elles de façon satisfaisante d’attester d’un niveau atteint ? Surtout, quel paradoxe de vouloir donner une attestation à des élèves qui passent des épreuves censées être adossées au CECRL, comme les programmes. Et quelle violence de classe à vouloir certifier les uns quand d’autres, la majorité, devront se contenter d’attestations sans valeur !

A consulter : un article du Café Pédagogique sur les EPLEI

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