Mathématiques Spécifiques en Première : un avenir qui reste à écrire

Le ministre a apparemment tranché le débat sur la persistance, en Première, d’un enseignement spécifique de Mathématiques, qui devrait demeurer définitivement. Mais il a suspendu au bilan de l’option de Première la forme définitive de cet enseignement, qui pourrait demeurer optionnel ou devenir obligatoire. Le SNES-FSU sera vigilant à ce que les effectifs faibles constatés à cette rentrée, et qui sont très largement imputables à l’annonce tardive de cette option et à une communication tronquée auprès des lycéens de Seconde en fin d’année dernière, ne biaise artificiellement le débat. Il défendra le retour d’un enseignement de Mathématiques dans le tronc commun, pour toutes et tous les élèves.
La question de l’horaire consacré à cet enseignement sera à nouveau portée par le SNES-FSU, qui a déjà défendu en CSE (Conseil Supérieur de l’Education) sa préférence pour un enseignement d’au moins 2 heures hebdomadaires, au lieu de l’actuelle 1h30.
A priori, quel que soit l’avenir de cet enseignement spécifique, le programme n’en sera plus modifié. Rappelons que le SNES-FSU s’était battu jusqu’au CSE pour préserver au maximum la liberté pédagogique des collègues en faisant retirer du programme la plupart des mentions qui tenaient de l’injonction à la différentiation des pratiques : le projet de programme initial contenait un long développement sur les modes de différentiation qui devaient être mises en œuvre (différentiation en classe, hors de la classe, dans les contenus, les pratiques, etc). Ne subsiste désormais dans l’introduction générale du programme que la mention d’un enseignement différencié « induit » par la diversité des élèves, et non plus « requis » par cette diversité, et dont les modalités relèvent bien du seul arbitrage des collègues, parmi des pistes indiquées dans le programme.

Au lycée, des retouches de programmes très attendues

Lors des différents échanges qui ont débouché sur l’élaboration du programme des Mathématiques Spécifiques en Première, l’Inspection générale comme la DGESCO ont rappelé leur volonté de retoucher, au cours de cette année scolaire, deux programmes :

  • celui de la Spécialité de Première, notamment pour en chasser les doublons (l’étude des suites, la mise en place de la dérivation, etc.) d’avec ce qui pourrait devenir un « tronc commun » de mathématiques à ce niveau. Cela reste pour le moment en partie suspendu au choix définitif qui sera fait concernant le devenir de l’actuelle option de Première, qui ne concerne pas cette année les élèves suivant la spécialité, ce qui pourrait ne plus être le cas à partir de la prochaine rentrée ;
  • le programme de Seconde, notamment dans l’idée de mieux l’articuler avec celui de Troisième et surtout de diminuer ses penchants à la propédeutique de la spécialité de Première.
    Le SNES-FSU en profitera pour revenir sur la question de la lourdeur des programmes, et de leur inadaptation à un horaire contraint qui, dans un nombre croissant d’établissements et par effet des restrictions budgétaires que subit le Second degré, peinent de plus en plus à dédoubler des classes lourdement chargées, au moins partiellement. Il a demandé aussi une révision du programme de Troisième, afin de mieux l’articuler avec la Seconde. Pour l’instant, l’Inspection générale et la DGSECO ne souhaitent pas ouvrir ce chantier, notamment en raison des évolutions qui pourraient toucher le collège dans les prochaines années. Enfin, il n’est pas envisagé d’évolutions en Terminale.

Déploiement du Plan Mathématiques

Malgré un rapport de l’inspection générale qui, en juin dernier, dressait un bilan très mitigé du déploiement du Plan Mathématiques dans le 1er degré, le ministère commence son déploiement au collège. Il s’agit de la mise en oeuvre des recommandations issues du rapport Villani-Torossian de 2018.
Rappelons pour mémoire que ce rapport avait pointé, bien au-delà de l’impact de la période Covid, la difficulté à faire vivre concrètement le volet formations des enseignant.e.s., qui se heurtent à des contraintes humaines fortes (manque de personnels formateurs et susceptibles d’animer les réseaux de formation) et également budgétaires (nécessité de revaloriser les fonctions de formateurs et animateurs de réseaux, et frais de déplacement). En ce qui concerne les « Laboratoires de Mathématiques », il n’y a à ce jour pas de bilan officiel, mais leur déploiement en académie semble rester pour le moment modeste (279 en France métropolitaine, 15 dans les DROM, 20 dans le réseau AEFE). Le SNES-FSU est disponible pour un bilan sur le sujet, notamment à partir du retour des académies : ce projet peut avoir du sens, mais il doit éviter l’écueil de l’encadrement des pratiques comme celui de la constitution d’une doxa pédagogique, et être axé sur des questionnements pédagogiques répondant aux besoins rencontrés et formalisés par les praticiens de terrain. Une démarche verticale et descendante n’aurait aucun sens : pour le SNES-FSU, le modèle à reconstruire doit se rapprocher de celui des IREM. Cela passe par une intégration, sous une forme ou une autre, de l’investissement des collègues qui le souhaitent dans ce type de dispositif, dans le cadre de leur service (décharge de service, prise en compte dans le cadre de la formation continue désormais obligatoire, etc.). Ce n’est pourtant pas le chemin que semble prendre ce dispositif dans le cadre du déploiement du Plan Mathématiques au collège.

Au collège, le risque de la contrainte pédagogique et de la standardisation des pratiques

Pour le moment, la partie la plus visible du déploiement du Plan Mathématiques dans le Second degré est la production d’un nombre assez considérables de documents, de nature très variée, que recense le site Eduscol, et qui ciblent nettement le collège.

On y retrouve pêle-mêle des guides (sur la résolution de problèmes, la trace écrite, les pratiques orales, les automatismes, grilles d’évaluation des manuels, etc.) ; des kits de communication (à destination des équipes pour populariser le site, mais aussi aux élèves, pour lutter contre les discriminations de genre et les représentations erronées) ; la promotion des « Laboratoires de mathématiques » dans une perspective fortement encadrée. Le tout en insistant sur les multiples évaluations en sixième, en début de seconde et, nouveauté, en quatrième ! Ces tests qui ont pour objectif d’identifier les acquis et les besoins des élèves ont une chance d’être utile en début d’année, si un retour vers les collègues est établi. En fin d’année, et il n’est évidemment par utile de rajouter encore un test de positionnement des élèves dont on connaît déjà les résultats : ces tests sont avant tout un outil de pilotage des établissements sur le territoire.

On y relève surtout – et c’est plus inquiétant – une batterie d’outils de pilotage, par les chefs d’établissement, du Plan Mathématiques au collège, qui passe par un travail conjoint avec les IPR, voire qui tentent d’opérer un transfert de certaines compétences des IPR aux chefs d’établissement, promus premiers pédagogues de l’établissement ! Ces derniers sont notamment encouragés à exercer une pression accrue sur les équipes et les professeurs de mathématiques, en plus d’une injonction à l’impulsion d’une mobilisation des équipes de mathématiques, y compris sur la base d’une liste de pratiques pédagogiques observables, d’un questionnement accru de l’engagement des collègues dans ces pratiques, l’ensemble concourant à l’instauration d’une pédagogie-type et standardisées, laissée au pilotage de non-experts. Une utilisation massive et plus systématisée d’un contrôle permanent de la progressions des élèves au moyen d’une mesure quasiment continue de leurs performances tout au long des cycles 3 et 4 est également fortement encouragé, dans une logique de « teach-to-test », notamment en référence au modèle d’évaluations PISA.
Il conviendra donc localement de veiller particulièrement à l’utilisation qui pourra être faite de ces fiches, et de la possible intromission des chefs d’établissements dans nos pratiques pédagogiques alors qu’ils n’ont, le plus souvent, aucune expertise en la matière en lien avec les mathématiques… Ne pas hésiter à nous signaler toute difficulté sur le sujet (maths@snes.edu).

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