Recours administratifs, recours contentieux
Tout acte administratif, réglementaire ou individuel, peut faire l’objet d’une contestation.
Toutefois la plus grande vigilance, voire une extrême prudence s’imposent, tant en raison de la complexité des procédures que des risques individuels ou collectifs auxquels des démarches inconsidérées ou approximatives peuvent conduire. En particulier il est vivement recommandé de consulter un militant du SNES-FSU, dans les S3 et S2, au S4, ou les militants de l’action juridique du SNES-FSU, notamment avant d’engager tout recours « contentieux », c’est-à-dire devant le juge.
Il convient de distinguer plusieurs types de recours ou de demandes.

Les recours administratifs précontentieux
Un recours administratif « précontentieux », c’est-à-dire avant toute saisine du juge, vise à contester devant l’administration une décision intervenue. Il doit normalement comprendre l’exposé des faits, soulever des « moyens », c’est-à-dire une argumentation juridique, et des « conclusions », c’est-à-dire une ou plusieurs demandes. Il existe plusieurs sortes de recours administratifs.
Le recours gracieux. Le recours gracieux vise à contester une décision devant l’auteur de celle-ci. L’identification de cet auteur est en général simple puisque, en principe, la décision contestée doit comprendre le nom, le prénom, la qualité et la signature de son auteur.
Le recours hiérarchique. Le recours hiérarchique vise à contester une décision devant le supérieur hiérarchique de l’auteur de celle-ci, par exemple le recteur face au chef d’établissement ou le ministre par rapport au recteur. Mais il faut savoir que, depuis la déconcentration, l’autorité hiérarchique ne répond que très rarement, sinon pour… renvoyer à l’autorité déconcentrée.
Le Recours administratif préalable obligatoire (RAPO). Dans certains cas, des textes prévoient qu’aucun recours contentieux ne peut être engagé, à peine d’irrecevabilité, sans introduire un recours administratif préalable. C’est par exemple le cas en matière électorale ou en cas de contestation d’une créance alléguée par l’État. C’est aussi le cas pour les agents de l’Éducation nationale dans l’académie de Lyon. Une loi prévoit de le généraliser pour la plupart des litiges mettant en cause les relations entre les agents publics et leur employeur, mais elle n’entrera en vigueur qu’après la publication d’un décret d’application qui se fait attendre.
Comment déposer un recours administratif. Tout recours doit être déposé par écrit, et il importe surtout de conserver une preuve du dépôt : remise d’une « décharge », d’une photocopie avec le tampon « arrivé le… », ou envoi d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Attention aux délais ! On le sait trop peu : écrire à l’administration fait courir des délais, au risque de se laisser forclore en cas d’inattention.
La publicité. Une décision de caractère réglementaire doit normalement être publiée, en principe au Journal Officiel de la République française, ou pour certaines décisions au Bulletin Officiel des ministères (par exemple des tableaux de promotion), ou pour certains actes par voie d’affichage (décisions d’un conseil d’administration d’un collège ou d’un lycée par exemple). Dans tous les cas, la publicité doit être « suffisante », « complète » et « régulière », sauf à ne faire courir aucun délai. Notons que depuis peu, l’affichage d’un texte en ligne vaut publication au Journal Officiel (sur le site de « Legifrance » : www.legifrance.gouv.fr).
Une décision individuelle est normalement « notifiée » à l’intéressé. Notons que la signature, par ce dernier, n’a d’autre portée que d’attester la matérialité et la date de la notification, et ne signifie en aucune façon son acceptation par lui. Très souvent la preuve de la notification rapportée par la signature de l’intéressé se révèle utile, lorsque par exemple, lors d’un procès, l’administration cherche à se dérober à ses obligations.
Lorsqu’une décision n’est pas notifiée ou publiée et que l’on en connaît l’existence, il est toujours possible d’en demander la production à l’administration concernée.

Les demandes directes à l’administration
Nous entendons par là les cas où une personne formule auprès de l’administration une demande avant même toute décision de l’administration. Cette demande vise à provoquer une décision de cette dernière, que l’on pourra ainsi contester. C’est donc le demandeur qui fait courir les délais.
Ici aussi il est souhaitable que la demande comprenne l’exposé des faits, des moyens, et naturellement des conclusions.
Les réclamations préalables. Notamment pour toutes les demandes à des fins pécuniaires, une « réclamation préalable » (chiffrée) auprès de l’administration est indispensable avant toute saisine du juge, à peine d’irrecevabilité. Il en est de même en matière électorale (on parle alors de « protestation »).
Attention aux délais ! Ici encore, le dépôt d’une demande fait courir des délais, au risque de se laisser forclore en cas d’inattention.

Les recours contentieux
La plupart des litiges qui concernent les personnels de second degré sont des litiges de droit public et relèvent de la compétence des juridictions administratives. Nous nous en tiendrons donc à ces derniers. Pour les autres cas, prendre contact avec les militants de l’action juridique.
Selon les cas, il faut saisir le tribunal administratif du lieu de la résidence administrative (en appel la cour administrative d’appel), ou le Conseil d’État, compétent en cassation et en premier et dernier ressort pour certains litiges.
Il existe principalement deux types de recours administratifs contentieux.
Le recours pour excès de pouvoir. Il vise à obtenir du juge l’annulation d’une décision qui fait grief. Cette décision éventuellement annulée étant, sauf exception, réputée n’être jamais intervenue. Le recours au ministère d’avocat n’est pas obligatoire, sauf en cassation devant le Conseil d’État pour les litiges concernant des décisions individuelles.
Le recours de plein contentieux. Il vise à obtenir du juge davantage qu’une annulation, puisque celui-ci va substituer sa décision à celle de l’administration. C’est ainsi qu’il pourra par exemple condamner la collectivité publique mise en cause au versement de sommes d’argent (dommages et intérêts, traitements, etc.), ou prononcer la décharge d’une dette alléguée par celle-ci, ou encore en matière électorale arrêter les résultats d’une élection. Le recours au ministère d’avocat est en principe obligatoire, sauf pour les agents publics dans les litiges qui les opposent à leur employeur devant le tribunal administratif (donc, pas en appel, où il faut un avocat), ou encore en matière électorale. L’avocat est obligatoire en cas d’appel.
Comment déposer un recours administratif contentieux. Tout recours doit être déposé par écrit, par courrier (recommandé avec demande d’avis de réception) adressé au greffe de la juridiction, ou déposé à celui-ci.
Il doit impérativement, à peine d’irrecevabilité (c’est-à-dire qu’il ne sera pas examiné au fond), comprendre l’exposé des faits, soulever des « moyens », c’est-à-dire une argumentation juridique, et des « conclusions », c’est-à-dire une ou plusieurs demandes.
Il est prudent de prendre des conseils, notamment des militants de l’action juridique du SNES-FSU.

Les règles de délai
Il n’est pas question ici de présenter l’ensemble des règles de délai applicables au contentieux administratif. Nous nous en tiendrons donc à l’essentiel, c’est-à-dire aux règles les plus fréquentes.
Délai simple et délai franc. Il faut distinguer les délais simples et les délais francs.
Dans tous les cas, le délai commence à courir le lendemain du jour où la publicité de l’acte est réalisée (publication, notification, etc.). Exemple : un délai de 2 mois.
Pour un délai franc, le jour initial et le jour final ne comptent pas : pour une décision notifiée ou publiée le 13 août, le délai commence à courir le 14 août à 0 heure et expire le 15 octobre à 24 heures.
Pour les délais simples, le jour initial ne compte pas, mais le jour final est inclus dans le délai : pour une décision notifiée ou publiée le 13 août, le délai commence à courir le 14 août à 0 heure et expire le 14 octobre à 24 heures.
Lorsque le dernier jour inclus dans le délai tombe un jour non ouvrable, le délai est reporté à l’expiration du premier jour ouvrable. Dans tous les cas, n’attendez pas le dernier jour.
Le délai contentieux de droit commun. La règle générale qui, rappelons-le, tolère des exceptions (par exemple en matière électorale), fixe le « délai contentieux », c’est-à-dire pour saisir le juge, à deux mois à compter de la publication ou de la notification de la décision contestée. Cela signifie que tout recours contentieux (devant le juge) introduit après l’expiration de ce délai sera irrecevable, quel que soit son bien-fondé. Précisons qu’il s’agit d’un délai franc.
Prolongation des délais. Dans certains cas les délais sont « prolongés » (et non « prorogés », cf. infra). C’est notamment le cas avec le « délai de distance ». Le délai contentieux est prolongé d’un mois pour les résidents d’un département ou d’un territoire d’outre-mer devant saisir une juridiction située en métropole, ou inversement pour les résidents métropolitains devant saisir une juridiction située dans un département ou d’un territoire d’outre-mer. Ce délai est de deux mois pour les résidents à l’étranger.
Décision explicite et décision implicite. Cette règle du délai de droit commun est assez simple lorsqu’il s’agit de contester une décision existante (et notifiée). Qu’en est-il lorsque l’intéressé fait une « demande directe » à l’administration, par exemple une « réclamation préalable » (cf. supra 4.2.), ou encore un recours gracieux ou hiérarchique ?
Il convient alors de distinguer trois cas.
1. Si le demandeur obtient une réponse écrite pendant le délai de deux mois à compter du dépôt de la demande :
– il obtient gain de cause et la question est en principe réglée ;
– l’administration rejette, totalement ou partiellement, sa demande, et le délai contentieux est repoussé de deux mois à compter de la notification de ce rejet. C’est un délai franc.
2. Si l’administration ne répond pas au bout de deux mois, elle est réputée avoir opposé à la demande une décision de « rejet implicite » ; le délai de saisine du juge administratif commence donc à courir le lendemain du jour où ce rejet implicite est acquis. C’est un délai simple de 2 mois à compter du rejet implicite. Attention, pour les relations entre les agents et leur administration, cette règle est toujours d’usage contrairement à ce que certains avancent. En effet, la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 ne nous concerne pas en tant qu’agent public conformément à l’article 1 qui dispose : « (…) le silence gardé par l’administration pendant deux mois vaut décision de rejet (…) Dans les relations entre les autorités administratives et leurs agents.  »
3. Si, une fois la décision implicite de rejet acquise, l’administration notifie une décision expresse de rejet pendant le délai simple de deux mois à compter de la date de ce rejet implicite, le délai de deux mois est rouvert à compter du lendemain de cette notification, et ce nouveau délai est alors un délai franc.
À noter : lorsqu’il y a une demande pécuniaire, le délai ne court pas en cas de rejet implicite, mais uniquement en cas de rejet explicite dûment notifié par écrit, à charge de l’administration de rapporter la preuve de la notification.
La prorogation du délai contentieux. Le délai contentieux peut être « prorogé », soit par un recours hiérarchique, soit par un recours gracieux. Par exemple une décision notifiée le 3 juin doit normalement être déférée au juge avant le délai de deux mois. Mais si un recours gracieux par exemple a été reçu par l’administration (c’est bien la date de réception qui compte) le 3 juillet, le délai est prorogé jusqu’au 4 septembre à 24 heures, date à compter de laquelle le requérant dispose encore de deux mois pour contester devant le juge. Il est évidemment prudent de ne pas attendre le dernier moment pour chacun de ces délais, et de tenir compte du délai normal d’acheminement du courrier par la poste.
Attention ! un nouveau recours administratif après un premier ne proroge pas à nouveau le délai contentieux (par exemple un deuxième recours gracieux ou un recours hiérarchique après un recours gracieux). Un cas particulier : la saisine de la commission paritaire. La saisine de la commission administrative paritaire, notamment en matière de notation, est d’une nature particulière : elle ne se substitue pas au recours gracieux ou au recours hiérarchique et ne fait pas courir le délai contentieux. C’est la notification de la notation par exemple qui fera courir celui-ci.
La notification des voies et délais de recours. Les délais contentieux ne sont opposables, s’agissant d’une décision individuelle, qu’à la condition que l’indication des voies et délais de recours soient notifiés au destinataire. Une notification sans cette mention ne fait donc courir aucun délai. Rappelons, pour finir, que même si la décision est illégale, si elle est créatrice de droit pour l’agent, l’administration ne peut plus la retirer au-delà d’un délai de 4 mois. C’est l’arrêt Ternon (CE n° 197018 du 26 octobre 2001).
N’hésitez pas à contacter l’action juridique du SNES-FSU : action.juridique@snes.edu.