
Les assises de la santé scolaire se sont tenues le 14 mai à Paris devant un public composé d’inspecteur·trices, de chef·fes d’établissement, de conseiller·ères techniques,de médecins, d’assistant·es de service social, d’infirmier·es, de PsyEN EDO et EDA et de représentant·es d’organisations professionnelles.
Qu’on ne s’y trompe pas ! Il ne s’agit pas simplement de mettre en place une meilleure coordination entre les « personnels ressources » pour prendre en charge plus efficacement la santé à l’École, mais d’une redéfinition du rôle des acteurs du monde de la santé et de l’École !
Le déploiement d’une conception idéologique et gestionnaire de la santé à L’École
Les intervenant·es étaient tous·tes issu·es du monde médical (médecin de santé publique ou psychiatre) ; les tables rondes composées de chefs d’établissements, DASEN ou conseiller·ères techniques, ou psychologues du premier degré manifestement acquis aux projets ministériels de rapprochement des PsyEN avec la filière des personnels médico sociaux. La nécessité de créer un poste de CT psychologue dans les académies et les départements a en effet été répétée consciencieusement par différents participants à ces deux tables rondes (DASEN, chef·fes d’établissements, CT divers …). Une conseillère technique académique psychologue EDA a présenté son travail auprès du recteur de l’académie d’Amiens, sans que l’on puisse en mesurer l’intérêt pour les équipes sur le terrain.
Malgré les derniers évènements dramatiques survenus dans les collèges et les lycées, la Ministre É. Borne l’a confirmé : la priorité doit être donnée au premier degré ! … mais sans annonce de moyens supplémentaires.
Les priorités du ministère
- la nécessité pour l’État de se conformer à ses obligations réglementaires car la visite médicale de 6 ans n’est aujourd’hui assurée que pour 20 % des élèves ;
- la volonté d’une détection précoce des difficultés et troubles psychologiques (…au risque de « pathologiser » le développement de l’enfant) ;
- la promotion de la santé.
Comme dans l’enquête ENABEE, un enfant de 6 à 11 ans qui s’oppose, pleure fréquemment ou fait des colères porterait tous les signes d’un trouble probable de santé mentale. Est-ce le retour du zéro de conduite ???
Après un exposé d’un médecin en santé publique sur la nécessité de ne pas culpabiliser les familles ni les enfants sur leurs habitudes alimentaires et de vie, dictées en grande partie par la précarité économique et sociale, une des propositions de la Ministre É. Borne vise à influer sur les comportements individuels des enfants et des adolescent·es par le déploiement des compétences psychosociales !
Les 10 mesures
1. Prévention – Détection – Promotion de la santé : recentrer les personnels (les médecins !) sur leur cœur de métier, en allégeant leur charge administrative
2. Détecter dès le plus jeune âge : 100 % des élèves doivent bénéficier d’une analyse personnalisée de leur situation de santé
3. Garantir une prise en charge plus efficace : faire alliance avec les partenaires de l’École
4. Systématiser les protocoles dédiés à la santé mentale dans toutes les écoles, les collèges et les lycées d’ici fin 2025
5. Former à la santé mentale les inspecteurs du premier degré et les personnels de direction
6. Former deux personnels repères en santé mentale dans chaque circonscription pour le premier degré et dans tous les collèges et les lycées d’ici la fin de l’année scolaire 2025-2026
7. Développer le partenariat avec les Maisons des Adolescents
8. Organiser un système de coupe-files pour faciliter l’accès des élèves aux centres médico-psychologiques (CMP)
9. Nommer 100 psychologues de l’Éducation nationale conseillers techniques en santé mentale (un dans chaque département) identifiés au sein de pôles départementaux santé, bien-être et protection de l’enfance
10. Renforcer la formation des personnels sociaux et de santé en faveur de la santé mentale
11. Renforcer les compétences psychosociales des élèves pour agir sur le climat scolaire et le bien-être des élèves
12. Généraliser le déploiement d’un module de sensibilisation auprès des lycéens et expérimenter son déploiement auprès des collégiens
Chronique annoncée d’une réécriture des missions et des statuts?
Y. Neuder, le Ministre de la Santé a eu le mérite d’être clair dans ses déclarations en envisageant une réforme des passages entre fonction publique hospitalière et École qui pourrait aller jusqu’à la suppression des concours, un exercice à temps partagé et un décloisonnement permettant un redéploiement des personnels !
Si ces orientations portées par la Santé n’ont pas été reprises par l’ÉN, il est clair que les mesures prises vont bien impacter les conditions de travail et les missions sur le terrain. Sous prétexte de meilleure coordination, ce sont bien en effet 100 postes qui pourraient être prélevés sur le terrain pour assurer les fonctions de conseiller technique en santé mentale, alors qu’il ne s’agit pas d’un problème de gouvernance mais de moyens !
Les Recteurs et les DASEN pourraient avoir le champ libre pour redéfinir les missions nationales des PsyEN en fonction de leur territoire. La feuille de route du « conseiller technique » sera donc de faire appliquer cette nouvelle répartition des rôles.
Si la Ministre a évoqué dans son propos des renforcements de postes pour les PsyEN, il convient de rester prudent·e dans la mesure où cela n’annonce pas de création de postes. Il est évident que l’objectif est bien d’appliquer cette réforme à moyens constants ! Cela a été répété sans relâche aux organisations syndicales !
Il est urgent de se mobiliser pour empêcher ce rouleau compresseur de mettre en danger notre place et notre rôle dans l’École !
À l’appel des syndicats de la FSU, AS, infirmier·ères, PsyEN :
soyons nombreux·ses à réagir et nous opposer à cette maltraitance de nos métiers
le 10 juin à Paris.
Pour empêcher :
- Un prélèvement de 100 postes sur le terrain alors que de 1000 postes sont actuellement vacants ou occupés par des non titulaires
- Une réécriture des missions à géométrie variable selon les décisions des DASEN
- Un risque d’encadrement de nos pratiques via la pression de ces nouveaux CT
- Aucune amélioration des conditions et au contraire une aggravation via les conventions qui seront signées avec les ARS
La FSU a fait d’autres propositions. Il faut se mobiliser pour obtenir qu’elles soient prises en compte !