Les projets de programmes en ligne sur le site du Conseil supérieur des programmes (CSP) sont soumis à la consultation de la profession par le ministère, du 11 mai au 12 juin.

GENERALITES

La grande nouveauté de ces programmes de LVER est qu’ils sont :
– inter-langues, y compris régionales, ce qui n’était pas le cas auparavant où chaque langue avait un programme de plusieurs dizaines de pages, réduit à 6 désormais. Cela n’est pas sans poser problème puisque cela nie la spécificité linguistique (notamment dans les stratégies d’apprentissage et d’acquisition) et les références culturelles communes et indispensables à chaque langue (ex : 1492 en espagnol, la monarchie en anglais, les deux Allemagnes, l’âge d’or des troubadours en occitan…). Cette uniformisation a déjà été opérée au lycée, lors de sa réforme.
– écrits par cycles, et non plus en paliers, abandonnant donc l’idée d’avoir des repères annuels, les seuls à mêmes de conduire à une culture commune pour l’ensemble des élèves sur le territoire, notamment pour les liens entre niveaux, il aurait été souhaitable que ceux-ci soient pensés. Par exemple, la phonologie n’est pas abordée au cycle 2 alors qu’elle apparaît au cycle 3. Pourtant, c’est au bien au cycle 2 qu’il faudrait l’installer.

Par ailleurs, ces programmes sont difficilement lisibles du fait de la multiplication des entrées, des annexes, des références à l’ancien programme dans le nouveau, de la terminologie employée dans certaines expressions, souvent peu explicites, etc.

Parfois très ambitieux, ces programmes ont été pensés dans le cadre des 3h actuels et sans réelle distinction entre LV1 et LV2 ou enseignement optionnel en langues vivantes régionales. Par conséquent, les programmes ne « collent » pas aux horaires réels à venir.
Or, depuis, des éléments nouveaux sont apparus, comme l’introduction de la LV2 en 5° à raison de 7,5 h pour l’ensemble du cycle 4 qui, au vu de la modulation retenue à l’intérieur de celui-ci, ne pourra qu’aboutir à une inégalité des situations selon les établissements, mis en cohérence, ce qui n’est pas acceptable.

Dans la liste des EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires) possibles, la présence des langues vivantes étrangères et régionales, est une manière de les réduire à une thématique comme les autres proposées et risque de rogner l’horaire disciplinaire, pourtant nécessaire à la réalisation du programme. Pire, s’ils se voient proposer, ce sera au détriment de l’horaire disciplinaire, alors que celui-ci ne couvre pas ou à peine les besoins dans les conditions actuelles (cf. effectifs pléthoriques d’élèves en classe).
Pour les langues vivantes régionales, la situation est encore plus grave : leur existence ne pourra se faire que par les EPI. Il n’y a pas, dans ce cadre là, d’enseignement (donc impossibilité de réaliser le programme) pour le niveau 6°.

CONTENUS

La logique du CECRL continue de prévaloir sur l’ensemble des cycles :
– dans les attendus :
. fin de cycle 3 : A1 dans les 5 activités langagières + A2 dans au moins 2 activités langagières.
. fin de cycle 4 :
LV1 : B1 dans au moins deux activités langagières sur 5.
LV2 : A2 dans au moins 2 activités langagières sur 5.
– le programme est écrit en fonction des activités langagières décrites dans le CECRL : « écouter et comprendre », « lire », « parler en continu », « réagir et dialoguer ».
Si les activités langagières sont associées à des connaissances et des « démarches et méthodes de travail », il faut espérer que les « exemples d’activités » proposés soient modifiés voire supprimés pour certains.
Les « repères de progressivité » retenus ne sont que des indications de différences entre les paliers du CECRL. Aux niveaux A1 et A2, ce n’est donc que l’environnement immédiat qui est visé, comme le veut le CECRL, ce qui n’est pas le meilleur moyen de créer de la curiosité.
Néanmoins, nous pouvons constater que le rapport à la langue maternelle (le français), ainsi que les aspects linguistiques semblent reprendre une plus grande importance que dans la réforme précédente (par exemple, possibilité de comparer les systèmes linguistiques, notamment par la traduction), même si leur renvoi systématique à la fin des programmes semble les minorer en même temps, tout comme l’absence de tout travail de mémorisation dans le texte.

Les croisements interdisciplinaires proposés semblent avoir été le fruit de beaucoup d’efforts et d’imagination pour une raison simple : les élèves n’ont pas, au collège, une maîtrise suffisante pour pouvoir utiliser facilement la langue dans un autre contexte et dans d’autres buts que celui de la classe de langue. Ainsi, même si les « ponts » sont souhaitables et envisageables, la réalité de terrain risque vite d’assombrir le tableau des objectifs proposés. Les problèmes connus des DNL au lycée (pas de temps de concertation, difficultés concrètes à organiser l’interdisciplinarité, etc.) pourraient bien se développer à leur tour au collège.
De plus, « l’histoire des arts est enseignée dans le cadre […] des langues vivantes, dont elle enrichit à la fois la dimension culturelle et le lexique de la description, des couleurs, des formes, des techniques et des émotions » (p.29). S’il s’agit d’intégrer l’histoire des arts dans les cours de langues, avec 6 thèmes à travailler sur l’ensemble du cycle 4 (voir programme d’histoire des arts du cycle 4), c’est extrêmement prescriptif. Avec le PEAC (Parcours d’Éducation Artistique et Culturelle) et le nouveau programme d’histoire des arts, il n’est pas certain que les dérives constatées avec l’actuelle histoire des arts disparaissent (ex : difficultés à articuler avec d’autres matières, passage de la LVER vers le français, etc.).

Par ailleurs, on constate la présence, voire l’invasion du numérique (messagerie virtuelle, visioconférence, supports et outils numériques). On a l’impression que le numérique sera l’outil qui va réduire la fracture linguistique et culturelle ! Or, il ne faut pas confondre la fin et les moyens : l’utilisation des technologies ne peuvent pas remplacer une réflexion pédagogique de fond…

Au cycle 4, le cadre notionnel prévu s’articule autour de l’entrée culturelle « aller de soi et de l’ici vers l’autre et l’ailleurs ». Cette formulation est très large et ambiguë. Les notions de « soi » et « ici » soulèvent des difficultés. Qu’entend-on par là et comment le professeur de langue va t-il les traiter ? Aucune définition n’est proposée ni aucune piste, si ce n’est des indications : « langages », « voyages et migrations », « école et société »…
Trois « entrées » sont prévues pour traiter le programme :
« Apprendre les langues pour comprendre et s’exprimer ».
« Apprendre les langues, découvrir l’autre et l’ailleurs. »
« Apprendre les langues, développer des stratégies, relier les savoirs. »
Sur ces trois entrées, les « démarches », « suggestions d’activités », « méthodes » ou « activités » (les termes n’ayant pas été tranchés apparemment puisque tous utilisés) sont parfois très éloignées de leur possible réalisation concrète sur le terrain et très liées aux TICE dont on connaît les difficultés d’utilisation dans les établissements.

EVALUATION

Rien n’est dit sur l’évaluation. A l’heure actuelle, les enseignant-es doivent « jongler » entre trois textes prescriptifs de nature différente : le socle, le CECRL et les programmes. Cette « confusion » conduit chaque enseignant-e à se creuser la tête en permanence pour essayer de concilier et de donner du sens à l’ensemble, sans plus trop savoir ce qui pourrait être considéré comme incontournable.
Par ailleurs, comment seront évaluées les LVER dans le cadre du collège et du DNB futurs ?

CONCLUSION

Les programmes de LVER doivent être aussi explicites que possibles sur les objectifs à atteindre et sur les compétences à développer. Les nouveaux programmes doivent également spécifier les objectifs, le choix des contenus et leur organisation, les tâches et activités préconisées, le rôle de l’enseignant et des élèves, le rôle des supports et autres matériels utilisés en cours de langue, si on ne veut pas laisser les enseignant-es dans la même situation qu’actuellement.
Les LVER sont un outil autant qu’une discipline à étudier en tant que telle, ce qui est peu perceptible dans les programmes proposés.

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