Les palmarès des lycées sont directement organisés par le ministère.

L’Education nationale explique depuis l’an dernier qu’ « il ne s’agit pas de réaliser un classement des lycées, mais de proposer une image de la réalité complexe et relative que constituent les résultats d’un établissement ». Outre qu’il est étonnant de prétendre réduire la complexité des mécanismes pédagogiques à 5 indicateurs chiffrés, le ministère tient en réalité un double discours : plusieurs jours avant leur publication officielle, les indicateurs de « valeur ajoutée » sont transmis « sous embargo » à la presse, de façon à ce que les journalistes puissent construire les « palmarès » dont le ministère fait mine de déplorer la publication. Et comment la presse pourrait-elle, sinon, publier des palmarès le jour où, officiellement, les indicateurs sont publiés ?…

Les indicateurs de valeur ajoutée sont très contestables en eux-mêmes.

Dans un rapport de 2015, l’Inspection générale était obligée de remarquer que les 2/3 des lycées les mieux classés en 2013… ne faisaient plus partie du « haut du tableau » l’année suivante. En fait, la « valeur ajoutée » des établissements, telle que mesurée par le ministère, est extrêmement volatile : cela devrait inciter à la prudence ! Ainsi donc, alors que les équipes pédagogiques sont stables, que la composition sociale ou scolaire des élèves évolue peu, la soi-disant « efficacité » d’un lycée peut varier très fortement d’une année sur l’autre… Cela montre la fragilité de ces indicateurs, très dépendants des effectifs des élèves, des redoublements, des réorientations dans un autre lycée pour suivre telle ou telle série non offerte dans le lycée d’origine, etc. Ils sont tellement fragiles que le ministère se demande s’il ne serait pas plus pertinent de faire des évaluations pluriannuelles, ou des évaluations par bassin… Mais cela supposerait d’abandonner l’idée « d’effet-établissement » que le ministère veut au contraire promouvoir, alors même que les enquêtes montrent qu’à origine sociale donnée, la réussite des élèves n’est quasiment pas influencée par l’établissement qu’ils fréquentent.

Les palmarès des lycées diffusent l’idée de « marché » de l’éducation, à l’encontre de la logique du service public.

Que cherche le ministère en rendant publics ces chiffres ?
Certainement pas à diffuser aux parents une « information » particulièrement fragile, et qui n’est pas nécessaire tant qu’on garantit l’égalité de l’éducation sur le territoire, principe fondamental du service public. D’ailleurs, l’immense majorité des parents continue de faire confiance à l’école publique, aux lycées publics. Certainement pas non plus à diffuser aux personnels une « information » qui leur permettrait d’analyser leur travail, de réfléchir collectivement et sans pression à leurs pratiques pour améliorer la réussite des élèves. En Finlande, pays souvent cité en référence, des indicateurs de ce genre sont réalisés, mais uniquement communiqués à chaque établissement concerné…
En réalité, le but, idéologique, est double :
– d’abord diffuser une vision de l’école fonctionnant comme un « marché », pour habituer les familles à «choisir » entre des établissements qu’on présente comme inégaux, hiérarchisés. Ce sont ces palmarès qui produisent l’image de lycées « haut de gamme » et « bas de gamme » ; c’est le ministère qui hiérarchise les établissements et les met en concurrence, en cherchant à saper la confiance des familles.
– ensuite il est évident que l’établissement de « palmarès » particulièrement contestables n’est qu’un outil de plus dans le nouveau « pilotage » de l’éducation nationale par la mise en concurrence généralisée des établissements et des personnels. Il s’agit de « mettre la pression » aux agents du système éducatif.

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