Madame la Ministre, En dépit des analyses, des alertes et critiques émises par le SNES-FSU et le SNEP-FSU, malgré de fortes mobilisations des personnels mais aussi de parents, d’associations… prouvant un large rejet de votre réforme du collège, vous avez décidé de la maintenir en l’état pour la rentrée 2016. Chacun sait pourtant qu’une réforme pour « transformer » l’école sans le soutien de ceux qui la font au quotidien, en particulier les enseignants, c’est construire une réforme pour rien… Loin de s’affaiblir, la contestation des enseignants perdure depuis plus de 6 mois et se manifeste dans une majorité d’établissements notamment à l’occasion des journées de formation ressenties par les personnels comme une façon de les contraindre à accepter une réforme contraire à la conception qu’ils ont de leur métier. Mesurant les effets délétères pour leurs conditions de travail, leurs disciplines et la qualité des formations dispensées aux élèves, attachés à leur métier et soucieux de leurs missions, de nombreux enseignants s’expriment de la seule façon qu’il leur a été laissée. Souvent dans l’incapacité de répondre aux questions posées et de justifier des dispositifs technocratiques peu probants, les autorités hiérarchiques usent de faux arguments d’autorité pour couper court aux discussions. Cruel aveu de faiblesse s’il en est. Ainsi, après avoir invoqué le décret sur la formation professionnelle de 2007 et l’obligation de formation imposée par l’employeur, après avoir, à l’initiative de la Dgesco, manipulé les textes en faisant référence aux « 1607 heures » soi-disant dues par les enseignants, certains Recteurs ont désormais recours au statut général pour faire appel au principe hiérarchique et devoir d’obéissance de tout fonctionnaire. Cette situation significative de tensions majeures et de fractures potentielles entre les enseignants eux-mêmes et entre ces derniers et les chefs d’établissement est préjudiciable à toute la communauté éducative et devrait conduire à s’interroger sur le sens du mouvement enseignant. La nation, par leur statut, reconnaît à ces derniers l’exercice d’une profession de concepteur, nécessitant une capacité d’initiative et d’expertise fondée notamment sur l’expérience. Ces qualités peuvent amener à mettre en cause des réformes dont le contenu a été peu débattu et dont la prescription est éloignée du travail « réel ». C’est ce que signifie actuellement la majorité des enseignants en collège. Les personnels d’enseignement et d’éducation qui travaillent dans les collèges veulent pouvoir penser et construire ensemble les changements nécessaires au collège. Ils refusent les tentatives d’intimidation, de stigmatisation et de division qui sont à l’œuvre depuis la rentrée de septembre. Ils sont prêts à reprendre le fil des discussions brutalement interrompu par la publication des textes en mai 2015. Poursuivre dans la voie de l’imposition à tout prix d’une réforme rejetée par des personnels qui l’ont bien comprise, de l’autoritarisme et du refus de dialogue est mortifère pour le second degré, pour le système éducatif qui n’a jamais progressé sans l’adhésion des personnels, sans la reconnaissance de leur professionnalisme et de leur volonté de faire réussir tous les élèves qui leur sont confiés. Dans l’intérêt de tous et particulièrement des élèves, nous vous demandons instamment, Madame la Ministre, de bien vouloir faire cesser toutes les pressions sur les personnels destinées à les soumettre, de stopper les opérations de mise en œuvre à la rentrée 2016 d’une réforme plus technocratique que pédagogique, et de reprendre des discussions trop vite unilatéralement conclues. Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre haute considération. Benoît HUBERT Frédérique ROLET Roland HUBERT 2016-01-06 Lettre à la ministre

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