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L’école est aujourd’hui interpellée de toutes parts en raison du rôle qu’elle doit jouer dans la société, mis en évidence après le terrible choc des attentats du début janvier 2015.

Cette interpellation est tout à fait légitime et l’Ecole se doit de relever le défi que la Nation lui pose : faire comprendre et partager à toutes et tous les valeurs de la République et apporter sa pierre à la cohésion sociale. Ces événements ont mis en évidence la nécessité de faire partager par tous les jeunes l’importance de la laïcité, laïcité qui ne peut ni se réduire à la neutralité qui conduit au relativisme et au communautarisme, ni conduire à opposer un dogme à d’autres dogmes. Cela nécessite du temps et des échanges avec les élèves.

Les personnels, qui travaillent auprès des jeunes qui leur sont confiés, ne se déroberont pas.

Cependant, pour qu’ils accomplissent leur mission, il serait bon de cesser d’empiler les injonctions et les dispositifs, de commencer par reconnaître ce qu’ils font déjà depuis longtemps dans des conditions toujours plus difficiles et de comprendre pourquoi ce travail ne suffit pas, ou plus. Il faut sortir des poncifs éculés et parfois contradictoires qui traversent encore le débat public : les enseignants du second degré ne sont pas assez « bienveillants », les programmes scolaires sont trop centrés sur des savoirs, il faut supprimer les notes et remettre en cause les diplômes au profit de « livrets de compétences »… ou à l’inverse il faut restaurer l’autorité, le niveau baisse, certains jeunes ne sont pas faits pour l’Ecole…

Les équipes pédagogiques et éducatives ont besoin de sentir le soutien de leur hiérarchie, au lieu d’être mises, parfois par lâcheté ou par ignorance de la réalité de leur métier, au ban des accusés au moindre problème comme on l’a encore vu récemment dans un collège de Mulhouse.

Au lieu de focaliser, parfois pour étayer des a priori idéologiques, sur le nombre d’incidents qui ont émaillé la mise en place de la minute de silence organisée sur tout le territoire français le jeudi 8 janvier, posons clairement la question centrale : en quoi et pourquoi l’Ecole n’aurait pas été à la hauteur ? Rappelons tout de même que dans une grande majorité des établissements, les choses se sont passées sans problème notable.

Une réalité s’impose : réussir l’exercice périlleux, demandé aux personnels d’enseignement, d’éducation et d’encadrement, consistant à parler à chaud et sans possibilité de préparation collective avec leurs élèves de collège et de lycée des tragiques événements que nous venons de vivre n’a été possible que là où ces personnels avaient pu, au quotidien, préalablement établir des relations de confiance réciproque !

Or, aujourd’hui, la dégradation continue des conditions de travail, depuis le nombre d’élèves par classe jusqu’à la diminution régulière des horaires élèves qui entrave les possibilités d’inscription dans la durée du travail pédagogique, ne permet plus d’installer partout sereinement cette relation de confiance. Elle empêche également de plus en plus les personnels d’organiser un travail collectif permettant d’échanger et de débattre entre pairs et ainsi de mieux appréhender collectivement ce type de situations graves et inattendues.

Beaucoup de commentaires ont insisté sur l’importance de la culture face à l’obscurantisme à la source de ces attaques terroristes. L’organisation des enseignements au collège et les objectifs de la scolarité obligatoire centrée sur un socle commun du type de celui de 2005 sont-ils de nature à faire acquérir cette culture vivante dont on redécouvre aujourd’hui l’importance ? Il est permis d’en douter

L’étiolement de la formation continue, trop réduite au service après vente de réformes souvent parachutées, ne permet plus aux enseignants de confronter leurs expériences, ni d’enrichir leurs pratiques des apports de la recherche

Mais l’Ecole ne pourra rien seule, et toutes les valeurs sur lesquelles elle travaille avec les jeunes ne prendront de sens pour eux que s’ils les retrouvent dans leur vie à l’extérieur de l’Ecole. Or que vivent ces élèves dans une société profondément inégalitaire et ségrégative ? Quels espoirs cette société leur donne-t-elle quand l’accès a l’emploi est aussi fortement corrélé à l‘appartenance sociale ou à l’origine ? quelle place peuvent-ils espérer quand leur culture familiale est si souvent ignorée, voire niée même quand elle est respectueuse des valeurs de la République ?

L’Ecole peut plus et mieux. Elle doit pouvoir remplir sa mission et répondre à l’exigence sociale de sa réussite. Donnons-lui les moyens de le faire, faisons confiance à ses personnels et cessons de la dénigrer à la moindre occasion ou d’en faire le bouc émissaire des échecs des politiques sociales et économiques.
L’avenir de la jeunesse de ce pays mérite bien cet effort de la nation et ce rassemblement autour d’une Ecole laïque, porteuse des valeurs de la république, et qu’il convient d’urgence de revaloriser.
Alors oui, forte du soutien réaffirmé de la Nation, l’Ecole et ses personnels sauront relever le défi, pour notre jeunesse.

Frédérique ROLET, Roland HUBERT
Cosecrétaires généraux du SNES-FSU

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