Quelques remarques préliminaires:

1) Le PIAL est présenté comme la réponse à l’augmentation du nombre d’élèves en situation de handicap ayant une notification d’accompagnement humain par la MDPH, augmentation entraînant un accroissement du nombre d’accompagnants (AESH). Le PIAL est donc avant tout une tentative pour endiguer l’augmentation du nombre d’AESH (très coûteuse) en rationalisant la gestion de ces agents.

2) Le vademecum annonce que « L’expérimentation de Pôles inclusifs (…) et leur déploiement (…) ont amélioré l’accompagnement des élèves ». Sur quelles données se fonde cette conclusion optimiste ? Quels critères objectifs ont permis de constater cette amélioration, si amélioration il y a eu ? Il faut rappeler que si les PIAL ont bien fait l’objet d’une expérimentation, celle-ci a eu lieu dans l’année 2017-2018. Le premier déploiement auquel on a assisté en 2018-2019 a été une préfiguration, en aucun cas une expérimentation, d’une nouvelle modalité d’accompagnement des élèves en situation de handicap déjà inscrite dans la loi pour l’École de la confiance.
Le SNES-FSU n’a eu de cesse demander qu’une évaluation objective des PIAL soit réalisée avant que soit décidée leur pérennisation ou leur disparition.
3) Le PIAL trouve sa justification dans l’idée que l’élément essentiel dans l’accompagnement d’un élève en situation de handicap est le développement de son autonomie. Cette prise de position, réductrice et très contestable, témoigne d’un manque de connaissance du handicap. Le but des missions d’un AESH est moins l’autonomie de l’élève que lui donner accès aux apprentissages et lui permettre de prendre part à la vie d’un établissement scolaire (en l’aidant dans les actes de la vie quotidienne et en facilitant son rapport aux autres). Pour certains élèves, l’autonomie ne viendra jamais, et c’est en cela parfois que consiste leur situation de handicap, ce qui n’implique pas qu’ils n’aient pas leur place dans les EPLE.
4) L’appellation elle-même « Pôle inclusif d’accompagnement localisé » est particulièrement obscure et maltraite la langue.

Le vademecum se positionne:
« Les trois grands objectifs du PIAL sont :
1) un accompagnement humain défini au plus près des besoins de chaque élève (…)
2) une plus grande flexibilité dans l’organisation de l’accompagnement (…)
3) une professionnalisation des accompagnants et une amélioration de leurs conditions de travail ».

I. Qu’est-ce qu’un PIAL ?

Le PIAL peut prendre trois formes : le PIAL 1er degré, le PIAL 2nd degré et le PIAL inter-degré, respectivement pilotés par l’IEN de circonscription, le chef d’établissement et l’un des deux.
C’est l’IA-DASEN qui décident des « territoires passant en PIAL ». Les annonces pour la rentrée 2019 laissent entendre que les PIAL s’implanteront en lien avec la carte des ULIS.

II. Le SEI (Service éducation inclusive)

Ce service départemental inédit et implanté dans chaque DSDEN à partir de la rentrée a quatre missions :
1) il décide de l’affectation des AESH en fonction des notifications de la MDPH et des remontées des chefs d’établissement ;
2) il gère les AESH (carrière, formation) ;
3) il organise la cellule d’écoute à l’attention des familles ;
4) il organise le service ASH (Adaptation scolaire et scolarisation des élèves en situation de handicap).

III. Le coordonnateur de PIAL

Le chef d’établissement désigne un coordonnateur (sur la base du volontariat) dont les tâches seront :
1) l’élaboration des emplois du temps des AESH (en concertation avec le chef d’établissement ou l’IEN de circonscription) ;
2) la modulation de l’emploi du temps des AESH en fonction des besoins des élèves (en concertation avec l’équipe éducative), y compris en cours d’année scolaire ;
3) l’anticipation des besoins d’aide humaine pour la rentrée suivante ;
4) favoriser la continuité de l’accompagnement des élèves et éviter les ruptures de parcours.
Le coordonnateur du PIAL est un membre de l’équipe pédagogique et bénéficie d’une IMP en fonction du nombre d’AESH affectés dans le PIAL.

Deux remarques
a) Selon le vademecum, les tâches se répartissent différemment entre le coordonnateur, le chef d’établissement ou l’IEN de circonscription. Il faut donc comprendre que la répartition des rôles se décidera localement.
b) Le SNES-FSU dénonce la logique indemnitaire qui consiste à compenser l’accroissement des missions d’un agent par l’octroi d’une IMP au lieu d’une décharge horaire.

IV. L’AESH référent

Dans chaque DSDEN, un ou plusieurs AESH référent(s) peuvent être nommés (ce n’est une obligation).
L’AESH référent a pour mission « d’apporter un appui aux AESH nouvellement nommés et un soutien aux AESH en difficulté. » Le texte précise : il « apporte son aide et accepte de mutualiser ses outils et sa pratique professionnelle. Il rassure, conseille et accompagne. » Cet accompagnement peut se faire dans la classe ou en dehors.

V. Nouvelle expérimentation : le partenariat

En 2019, un PIAL par département bénéficiera de l’appui des professionnels du secteur médico-social coordonné en pôle de ressources. Une convention de partenariat précisera les modalités pratiques d’intervention de ces professionnels.

Cette expérimentation trouve sa légitimité dans le fait que la réussite des élèves en situation de handicap implique une coopération entre professionnels de l’éducation nationale et professionnels médico-sociaux. Cette expérimentation, si elle devait se généraliser, se heurte à une difficulté pratique conséquente : dispose-t-on d’un vivier suffisant de professionnels médico-sociaux pour alimenter ces partenariats ? Les SESSAD (Services d’éducation et de soins spéciaux à domicile) ont des listes d’attente dépassant plusieurs années, et beaucoup d’associations gestionnaires en lien avec le handicap n’ont pas embauché (du moins de manière significative) cette année. D’autre part, une question s’impose : si un seul PIAL par département entame une démarche partenariale avec le médico-social, quelle plus-value constitue les autres PIALs du même département en matière d’accueil des élèves en situation de handicap ? 

VI. L’organisation pédagogique et la qualité de la démarche

Les équipes pédagogiques prennent appui, dans leur analyse des besoins des élèves et dans leurs adaptations, sur trois outils :
a) le document de mise en œuvre du PPS (tel que défini dans la circulaire 2017-117 du 8 août 2016) ;
b) la plateforme Cap école inclusive (à destination des enseignants et des AESH dès la rentrée 2019) ;
c) le guide Qualinclus.

Le vademecum précise qu’une « évolution des modalités d’accompagnement des élèves en situation de handicap peut être proposée en Équipe de suivi de scolarisation (ESS) et notifiée par la CDAPH.

L’avis du SNES-FSU

La plateforme numérique Cap école inclusive et le guide d’auto-évaluation Qualinclus ne peuvent être que chronophages pour leurs utilisateurs, d’autant plus qu’aucun temps n’est prévu pour leur appropriation et leur utilisation dans les services. Ils représentent deux moyens pour le ministère de se défausser de son devoir de formation en le confiant à la responsabilité des agents.
La possibilité de faire évoluer les modalités d’accompagnement pose problème. D’une part, l’évolution ne peut consister que dans une modulation du volume horaire d’aide humaine et dans un passage d’une aide individualisée à mutualisée (ou inversement). Or, les modalités d’aide humaine font partie du droit à compensation défini par la loi de 2005 et sont notifiées par les CDAPH. Le ministère n’a aucun droit de regard sur ces notifications, ce qui garantit leur neutralité (l’organisme prescripteur, la MDPH, n’est pas l’organisme payeur, le MEN). Le PIAL est né en outre de la volonté d’endiguer le recours aux aides individualisées, ce qui rend peu probable que les évolutions recommandées aillent vers ce type d’aide (d’autant plus que le grand objectif est l’autonomie de l’élève). D’autre part, ces évolutions semblent impossibles dans la pratique. Si le texte précise que la notification par la CDAPH est nécessaire (afin de calmer les inquiétudes des associations de parents), chaque modification prendra plusieurs mois avant d’être effective si l’on tient compte des délais des MDPH déjà engorgées dans le traitement de dossiers. De plus, les possibles modifications des notifications en cours d’année contredisent l’effort de simplification administrative entrepris cette année, effort consistant précisément à étendre la durée des notifications afin d’épargner aux familles la récurrence d’un calvaire administratif. Enfin, on voit mal en quoi la flexibilité des modalités de l’aide humaine est au service de la réussite des élèves.

Ce vademecum montre que le PIAL est un outil de gestion au service de la flexibilité de l’accompagnement humain. Il n’est ni au service des élèves (le PIAL n’apporte aucun moyen ni aucune aide supplémentaire par rapport à ce qui existe déjà, il tend plutôt à les rogner), ni au service d’une amélioration du métier d’AESH. Ces derniers voient bien réaffirmer leur droit à formation, leur droit au remboursement des frais de déplacements (s’ils exercent en dehors de leur résidence administrative ou personnelle) et leur appartenance pleine et entière à la communauté éducative leur est reconnue. La création du SEI identifie également un interlocuteur désigné, ce qui est une bonne chose. Mais les AESH voient leurs emplois du temps modifiables en cours d’année, tout comme le contenu de leurs contrats (quotité, lieu d’exercice) par simple avenant. La « souplesse » introduite dans leur service risque de nuire à la cohérence de celui-ci.
Le PIAL, sans passer la ligne rouge d’une remise en cause directe de la loi de 2005, cherche à donner un droit de regard aux acteurs de l’Education nationale sur les mesures de compensation décidées par les MPDH. En cherchant à promouvoir le plus possible l’accompagnement mutualisé au détriment de l’accompagnement individualisé, on peut craindre que le PIAL n’aboutisse à une mise en concurrence des élèves en situation de handicap (notamment en cas d’absence d’un AESH).

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