Des épreuves locales qui minent le caractère national du baccalauréat

Comme l’a encore précisé le Ministère dans son document censé cadrer les E3C, il n’y a pas de règle nationale pour l’organisation. Ce sont des épreuves locales, décidées, surveillées et corrigées localement, ce qui est incompatible avec le caractère national du baccalauréat.
A l’échelle nationale et même locale, les élèves sont placés dans une situation totalement inégalitaire, aucun d’entre eux n’ayant le même volume de révision. De même, les modalités de passage de ces épreuves peuvent être extrêmement différentes. Tel passera son épreuve d’histoire-géographie en fin de journée après avoir suivi son emploi du temps habituel, telle autre « bénéficiera » d’une banalisation des cours qui lui permettra de se concentrer sur son travail. Ici, on aura prévu des salles adaptées, où l’on a de la place pour écrire (un par table), ailleurs ce sera une salle de cours ordinaire, et pas forcément confortable.

Enfin, le calendrier de passage des épreuves étant particulièrement souple, le risque de fuite des sujets très similaires entre établissements et élèves est inévitable : les premiers inaugureront les épreuves alors que leurs camarades auront connaissance des sujets déjà donnés ailleurs et pourront mieux se préparer.

Ceci n’est pas une grille de correction

Pour faire passer la pilule du bac local, les professeur·es d’histoire-géographie sont invité·es à s’entendre sur leurs attentes concernant les différents exercices des E3C. L’Inspection Générale promet tout et son contraire (« cadrage » et « souplesse » cf compte-rendu de l’audience de l’APHG), et localement, cela se traduit par l’envoi de grilles de correction sur les messageries professionnelles, en précisant « Il n’y a pas de grille nationale ou académique ».

Non seulement, il n’y a plus d’horizon d’attente commun pour des épreuves d’histoire-géographie d’un examen national, mais l’important travail de concertation local qui en découle n’est pas pris en compte : pas de temps banalisé prévu pour se voir, échanger entre collègues, aussi bien pour le choix des sujets, fournis sans corrigé, que pour les critères de correction.

Des épreuves qui font travailler les élèves dans des conditions anti-pédagogiques

Après seulement quatre mois de cours, qui plus est sans véritable visibilité sur le type de sujets que contiendrait la Banque nationale (BNS), nos élèves vont être soumis à des épreuves d’examen pour lesquelles ils n’ont pas pu s’entraîner.

Par ailleurs, ils doivent s’approprier des programmes particulièrement indigestes, et aucun temps n’est prévu pour les révisions préalables aux E3C. Par exemple, devoir étudier trois thèmes et sujets d’étude en 3 mois et demi est une gageure avec 1h30 de cours par semaine dans les séries technologiques. Depuis la (tardive) ouverture de la BNS, nous pouvons constater que les sujets ne prennent pas en compte la diversité de nos progressions, ni la liberté pédagogique, et ne correspondent qu’imparfaitement aux objectifs et aux thèmes abordés par les programmes.

Dans le même temps beaucoup de nos élèves témoignent depuis le début de l’année scolaire de leur fatigue et de leur stress, qui ne font que croître à l’approche des examens. Du fait de programmes trop lourds, dans toutes les disciplines du lycée (pas seulement celles concernées par les E3C), les élèves ne peuvent construire des acquis solides, la charge de travail est pour eux anxiogène et décourageante. Le format de l’épreuve d’histoire-géographie est inadapté, comme le Snes-FSU le dit depuis la parution de la note de service : deux heures sont insuffisantes pour mettre en œuvre deux exercices exigeants, y compris avec guidage en première comme les textes le prévoient. Nous avons tous pu le constater en évaluant nos élèves depuis la rentrée de septembre.

Le Ministère, par la voix de l’Inspection générale et des inspection pédagogiques régionales, insiste sur le caractère prétendument formatif de l’évaluation des E3C. Quel bénéfice les élèves pourront-ils retirer, en termes de conseils méthodologiques, d’apprentissages, en passant des épreuves d’examen dans de telles conditions d’impréparation ? C’est un non-sens pédagogique de les y présenter.

Le métier mis à mal

La logique de bachotage induite par les E3C contribue à la perte de sens de notre métier, et au sentiment de participer ainsi à la mise en échec de nos élèves. Le décalage permanent entre des objectifs à atteindre et la réalité du travail dans les classes conduit à une détérioration de la relation pédagogique, pourtant fondamentale dans l’exercice de notre métier.

Le choix des sujets est renvoyé à la responsabilité locale des chefs d’établissement, qui s’en remettent aux enseignant·es de chaque discipline. Cela met les collègues dans une situation de porte-à-faux entre la nécessaire déontologie et la bienveillance qui les anime vis-à-vis des élèves. La hiérarchie elle-même ne sait plus comment arbitrer des contradictions aussi flagrantes: « c’est le but de choisir un sujet pour lequel vos élèves auront été extrêmement bien préparés »… mais « ne construisez pas vos cours en fonction des épreuves que vous aller donner » !

Enfin les conditions de rémunération pour ce travail supplémentaire, alors que les professeurs d’histoire-géographie devront aussi assurer leurs cours et tenir leurs progressions pour finir le programme de première (et celles des autres niveaux !), sont aussi incertaines que méprisantes. Le Ministère a évoqué une indemnité forfaitaire dont le montant n’est à ce jour pas clairement garanti.

Stop aux E3C !

A 10 jours du début officiel des épreuves, rien n’est prêt, les professeurs et les élèves continuent de découvrir les modalités d’organisation et de correction des épreuves : quel mépris !
Dès le mois d’octobre, le SNES-FSU a alerté sur l’impréparation des épreuves et la nécessité d’annuler cette session. Désormais, une très large intersyndicale s’est adressée au ministre. En s’obstinant à maintenir les E3C, Jean-Michel Blanquer prend une lourde responsabilité.

Le SNES-FSU appelle à agir pour bloquer les E3C : retrouvez toutes les propositions d’actions et les documents utiles pour interpeller votre Recteur, vos IPR, les parents d’élèves, vos collègues.

Le SNES-FSU impulsera et relayera ces actions pour continuer à mettre le ministre devant ses responsabilités et obtenir l’annulation de ces épreuves.

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