Pour la première fois depuis sa création en 2014, le Comité de suivi des retraites (CSR) a formulé des recommandations pour « prendre les mesures nécessaires pour ramener le système sur une trajectoire d’équilibre », sans pour autant « faire de recommandation précise sur le calendrier qui dépend de divers arbitrages qui reviennent au gouvernement ». L’an dernier pourtant à la même époque, la même présidente du CSR Yannick Moreau se félicitait que le CSR n’ait émis que de simples observations et non des recommandations au gouvernement portant sur le niveau du montant de pensions et celui du niveau de vie des retraités, l’équité entre assurés et la pérennité financière du système de retraites. L’année dernière tous ces objectifs étaient respectés. Même si la portée des indicateurs de solde des régimes de retraite peut être interrogée et si les dépenses restent contenues à long terme, le Comité estime nécessaire que soient trouvées des réponses aux nouvelles données démographiques.
C’est ce que met en avant le CSR pour expliquer le changement de terme cette année. Comme il existe des incertitudes sur les données migratoires et démographiques, on ne peut être qu’inquiet de ce que le gouvernement pourrait en tirer. S’il n’est pas obligé de suivre les recommandations du comité, l’avis le contraint à s’expliquer au moment du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Des projections et hypothèses discutables

En cause principalement la publication par l’Insee tous les 5 ans de projections démographiques sur lesquelles s’était justement appuyées le Conseil d’orientation des retraites (COR) dans son dernier rapport estimant que le ratio entre le nombre de personnes âgées (plus de 60 ans) et le nombre d’adultes en emploi (20 à 59 ans) doit être révisé à la hausse d’environ + 3 % vers 2040 et + 6 % vers 2060.
Cette modification provient d’une baisse de recettes attribuée à un rapport démographique moins favorable et un solde migratoire annuel négatif tenant compte des dernières projections de l’Insee. Pourtant l’année dernière, le même COR estimait que le solde financier du système de retraites pourrait revenir à l’équilibre financier entre 2020-2030 et « dégager des excédents à plus long terme » avec une croissance minimum d’1,5%. Cette année, le COR dans son rapport de juin 2017 repousse l’équilibre du système à 2040 et le lendemain de sa publication l’Insee tablait pourtant sur une croissance de 1,6%. Ce qui est certain, c’est bien que la publication d’un rapport tous les ans basé sur des projections à 25 ans avec des conclusions variant au gré des années implique que l’exercice d’analyse doit être très largement relativisé. Il faut noter enfin que le CSR révise ses hypothèses relatives à la masse salariale de la fonction publique. La politique salariale de l’État (moins d’emplois, gel du point d’indice, hausse de la part des primes) diminue la part des cotisations des fonctionnaires dans l’ensemble des ressources des régimes de retraite, mais comme ces cotisations sont supérieures à la moyenne des cotisations perçues, l’effet de structure provoque un affaiblissement des ressources pour l’ensemble du système !
Il faudra savoir ce que le gouvernement entend faire des réserves comme le souligne par ailleurs le CSR : « Le Comité estime par ailleurs que la période actuelle est propice à une réflexion approfondie sur le devenir du Fonds de réserve pour les retraites dont les perspectives sont aujourd’hui mal définies alors qu’il dispose de fonds prévus à l’origine pour aider à passer la bosse démographique ». De même autre point qu’il faudra avoir en mémoire : « Le comité remarque seulement que certaines pistes envisagées ne lui semblent pas obligatoirement génératrices d’économies, notamment celles qui seraient liées à la suppression des catégories actives de la Fonction publique ».
« Alors que le gouvernement a annoncé pour 2018 l’initiation d’une réforme des retraite », le comité observe qu’il est possible de mettre en place ces mesures de plusieurs manières : il pourrait être envisagé de procéder à ces ajustements dans le cadre de la réforme annoncée, ce qui conduirait à ne pas prendre de mesure à court terme. À l’opposé, le projet de réforme n’ayant jusqu’à présent pas été présenté comme visant la couverture de besoins de financement, ces ajustements pourraient intervenir en amont, dans les premières années de la législature. « Compte tenu des natures différentes des ajustements possibles, les deux solutions pourraient être combinées », suggère le CSR. À plus long terme, des mesures d’âge sont évoquées toujours en lien avec la dégradation du solde causée par l’allongement de l’espérance de vie qui pourrait « justifier des mesures visant à rétablir l’équité entre générations au regard de la durée de retraite relative à la durée de vie totale », note le comité, même si cette « perspective n’apparaît toutefois pas urgente ».
Une phrase pleine de saveur est aussi à relever sur le court terme : « une mesure telle qu’une sous-indexation des pensions permettrait des économies assez rapides », estime le comité, tout en reconnaissant qu’elle pourrait poser « des difficultés d’acceptation sociale » au moment même où le gouvernement augmente la CSG…

Nomination d’un haut-commissaire pour faire une réforme systémique ?

Jean-Paul Delevoye, ancien ministre de la Fonction publique en 2003 a été choisi par le président de la république mi-septembre. Est-ce pour mettre en place « un système de retraite universel » ? Le passage à un régime par points ou en comptes notionnels aurait pour principale conséquence d’individualiser les droits en faisant disparaître les références collectives à un âge de départ ou à une durée de cotisation. Le régime serait dégagé de toute obligation en matière de taux de remplacement et de niveau de vie des retraités, chaque individu étant renvoyé à sa responsabilité individuelle pour construire sa retraite. Mais on sait bien que les « choix » faits par chacun peuvent être subis ou contraints par des situations différentes d’emploi, de pénibilité du travail et de revenus, de famille, et cela conduirait à accroître les inégalités de retraites. Il n’est pas démontré que la lisibilité serait meilleure avec cette réforme systémique. Et l’ajustement des pensions se faisant « mécaniquement », en fonction de la conjoncture ou l’espérance de vie, plus besoin de débat sur le financement des retraites !

Vers la baisse des pensions

Si l’on veut maintenir le niveau de vie des retraités, il faut nécessairement accroître les moyens de financement des régimes de retraite. Les débats sur la réforme systémique occultent cette réalité et font le choix de la baisse des pensions, sans oser assumer politiquement ce choix vis-à-vis de l’opinion. Pour la FSU, il n’est pas question d’entériner des dégradations de nos systèmes de retraites, ni d’abandonner le code des pensions.

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