SES : quel état des lieux dans le lycée « réformé » ?

Les allègements du programme de 2nde, obtenus en juillet dernier par une action intersyndicale en appui de l’initiative de l’Apses, ont provoqué le courroux des lobbies patronaux (Medef, Institut de l’Entreprise). Courroux relayé par une certaine presse économique, et qui a amené certaines « figures » à quitter bruyamment le « Conseil national éducation-économie » (CNEE). Mais qui a surtout amené le Ministère de l’Éducation à commander un rapport sur l’enseignement des SES, qui devra être rédigé conjointement par le CNEE et le CSP (Conseil supérieur des programmes).

A cette fin, une commission est en voie d’être mise en place pour mener des auditions et des entretiens avec tout un ensemble d’acteurs qui ont, de manière plus ou moins légitime, leur « mot à dire » sur « ce qu’on enseigne en SES ». Le SNES-FSU demandera évidemment à être reçu par cette commission, pour porter ses mandats concernant la discipline.

Il est toujours légitime de réfléchir sur les contenus et les programmes disciplinaires, et de faire un bilan critique de l’existant. On peut néanmoins s’interroger sur la pression qu’exercent les lobbies patronaux sur cette discipline. En tout état de cause, la nécessaire réflexion sur « ce qui doit s’enseigner en SES » ne saurait passer sous silence un bilan plus large de la situation de la discipline, depuis la mise en œuvre de la réforme du lycée en 2010.

Ce bilan, le SNES-FSU l’a effectué au cours de deux journées de réflexion disciplinaire, l’année passée. Et il n’est pas réjouissant.

Les SES en 2nde.

Les SES sont découvertes par davantage d’élèves depuis la réforme : 85% des élèves de 2nde, contre 46% auparavant, suivent cet enseignement. Mais cet élargissement du public se fait à un « prix » très élevé : diminution horaire de 40% ; accès très rare à des « heures à effectifs réduits », rendant difficile le travail sur les méthodes spécifiques des SES ; programme dont la lourdeur initiale a, à juste titre, été allégée.

Par ailleurs, en sur-interprétant de façon malhonnête le BO du 4/02/2010, qui précise que le suivi d’un enseignement d’exploration « ne conditionne en rien l’accès à un parcours particulier du cycle terminal », de nombreux chefs d’établissement prétendent « interdire » de noter (ce qui est contraire à la liberté pédagogique), ou font disparaître les notes de SES des bulletins scolaires, ce qui crée une hiérarchie entre disciplines « importantes » et disciplines « secondaires ».

Tout ceci a abouti à une profonde dégradation des conditions de travail en 2nde, qui se traduit par une réelle souffrance pour les enseignants.

Enfin, la réforme a incité les enseignants de SES et d’éco-gestion à prendre en charge, indistinctement, les enseignements de SES et de PFEG ; lorsque cela se fait, c’est essentiellement pour des raisons de complément de service, mais cela peut aussi donner lieu à des répartitions qui mettent les enseignants en concurrence. Enfin, cela remet en cause le respect de la qualification disciplinaire. Par ailleurs, alors même que le ministère a renoncé à mettre en place un enseignement de « connaissance du monde économique » suite à un avis négatif du CSE (juillet 2012), des établissements de plus en plus nombreux mettent en place des « fusions sauvages » de SES et PFEG, sans respecter le cadre réglementaire de l’expérimentation, en allant à l’encontre des enseignants. Ceci aboutit entre autres au non-respect du cadre des programmes. Il ne faut pas hésiter à nous contacter en cas de problème.

Les SES dans le cycle terminal.

Avant la réforme, les SES disposaient d’une option en 1ère, qui devenait une spécialité en terminale, avec 2h à chaque niveau. La réforme a supprimé l’option en 1ère, et réduit l’horaire de la spécialité en terminale à 1h30 – mais avec deux spécialités distinctes de SES (« sciences sociales et politiques » et « économie approfondie »). L’horaire-élève du tronc commun a peu évolué, mais les conditions d’enseignement sont variables d’un établissement à l’autre, du fait des logiques locales d’attribution des heures à effectifs réduits. Dans certains établissements, cela rend le travail de préparation aux épreuves de bac plus difficiles que dans d’autres (puisque c’est un des usages essentiels des « TD », lorsqu’ils existent).

Malgré les allègements obtenus depuis la rentrée 2013 – ce qui était une demande du Snes – les programmes restent toujours très lourds, en particulier en 1ère ES. Mais surtout, ces programmes ont remis en cause, sans débat avec la profession, l’approche jusqu’ici centrale en SES : une approche résolument pluridisciplinaire, et partant des « problèmes sociaux » pour présenter l’apport des savoirs disciplinaires. Ces programmes ont ainsi renforcé lourdement le cloisonnement « économie / sociologie », et ont cherché à imposer une approche par des problématiques « universitaires / théoriques », des questionnements très abstraits qui ne tiennent pas compte des élèves et des manières les plus pertinentes d’accrocher leur intérêt (sans en rabattre sur les exigences disciplinaires).

Concernant les épreuves du baccalauréat, enfin, la réforme s’est accompagnée d’une modification des règles de la dissertation et de la création d’une nouvelle épreuve (« épreuve composée », EC). Les textes concernant la dissertation ont entraîné des inquiétudes (risque de disparition de sujets « débats » au profit de sujets « techniques »), mais les sujets tombés lors des 3 sessions qui ont suivi n’ont pas forcément posé problème. L’EC pose davantage de problèmes, qui renvoient tous à l’absence de problématisation des sujets, qui demandent généralement d’exposer des mécanismes sans les mettre en débat : cette logique contredit une des dimensions essentielles de la discipline : sa contribution à la formation de citoyens à l’esprit critique aiguisé.

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