Pour le gouvernement « l’apprentissage est une solution d’avenir pour l’emploi ». Reste à passer aux actes.

Étudiant en BTS de Conception de pro- duits industriels Mouhammed a obtenu son diplôme en juin dernier. Souhaitant poursuivre ses études, la licence professionnelle « design industriel » était faite pour lui, mais cette formation est en apprentissage…

Alors bien sûr, il a été admis en CFA sous réserve de trouver et signer un contrat de travail. Désillusion : toutes les entreprises qu’il a contactées lui ont gentiment répondu qu’ elles ne prennent des apprentis qu’ au niveau très supérieur, master pro ou ingénieurs… Il est revenu nous voir, Mouhammed, au lycée, un peu perdu.

Alors, les gouvernements peuvent essayer de communiquer sur le développement de l’apprentissage et injecter des masses d’aides aux entreprises, de déduction de charges sociales, l’apprentissage sera encore à l’image du marché de l’emploi : il continuera à diminuer pour les plus faibles niveaux de qualification, il sera discriminant préférant les jeunes hommes et repoussant les minorités visibles, il ne se développera que dans les secteurs en tension au niveau de l’emploi.

Le mythe de l’apprentissage permettant aux jeunes en difficulté scolaire de trouver une formation, un diplôme, un emploi est mort. Nombre de jeunes attirés par les sirènes gouvernementales risquent de rêver à un avenir auquel ils n’auront pas droit, faute de place en entreprise.

Garantir l’apprentissage pour tous : une nécessité

Et ceux qui en trouveront seront confrontés à des problèmes inattendus : les ruptures de contrats qui concernent un quart des apprentis, l’absence de contrôle aussi bien au niveau de l’inspection du travail que des inspections pédagogiques des CFA, les formations centrées sur les besoins immédiats des entre- prises interdisant toute possibilité de poursuite d’ études…

Et bien sûr, cela n’est pas la réalité des plus de 400 000 jeunes qui sont en apprentissage, certaines formations fonctionnent très bien, certaines entreprises sont réellement investies, les jeunes y atteignent de hauts niveaux de qualification. Mais l’ apprentissage est une formation initiale, alors il est de la responsabilité de l’État de garantir l’accès de tous les jeunes à la qualification. Tous ceux qui ne trouvent pas d’ entreprises, qui sont victimes de ruptures, pour qui l’alternance n’est pas la solution devraient se voir offrir des solutions, dans le service public d’éducation et de formation, leur permettant de poursuivre leurs études et d’atteindre le diplôme visé.

Alors, madame la ministre, vous faites quoi pour Mouhammed ?

Thierry Reygades