Cette annonce, qui s’adresse à tous les PsyEN EDA et EDO, tranche subrepticement dans le débat qui oppose ceux qui voudraient assimiler les PsyEN aux personnels médico-sociaux et ceux qui veulent conserver le statut et les missions actuelles des Psychologues de l’Éducation nationale.

Alors que les PsyEN ont été délibérément ignoré·es depuis la rentrée, cette annonce traduit une nouvelle illustration de l’absence de dialogue social.

Interpellée par la FSU sur l’invisibilité organisée du corps des PsyEN, la ministre répond par une petite annonce qui indique clairement qu’au ministère les choix sont faits !

Sous la direction de la cheffe de bureau de la santé et de l’action sociale, ce nouveau ou cette nouvelle conseiller·ère technique « …aura en charge l’accompagnement du projet visant à promouvoir un environnement scolaire propice à une bonne santé mentale et exempt de harcèlement, déposé auprès de l’Union européenne… ».

Si l’ambition est d’importance, les marges de manœuvres risquent d’être limitées ! En effet, les enjeux sont également financiers puisque des crédits seront débloqués en fonction de l’initiative des états à mettre en œuvre de « bonnes pratiques ».

La démarche se situe dans le cadre de l’« École promotrice de santé », qui concernaient jusqu’en avril 2021 les infirmier·ères et les médecins, et dans laquelle un amendement parlementaire, lui aussi subreptice, a fait glisser les PsyEN. Désormais, les PsyEN doivent prendre en compte ces nouvelles directives, bien que leurs missions ne les mentionnent pas.

Certains pourraient voir d’un bon œil la présence d’un PsyEN à la DGESCO comme une preuve de reconnaissance. Mais qu’on ne s’y trompe pas !

Ce choix de recruter un conseiller technique et non un·e chargé·e de mission par exemple, traduit la volonté de calquer la structuration du corps des PsyEN sur celle des personnels médico-sociaux (médecins, infirmiers, AS). Or, les PsyEN sont inscrit·es dans une chaîne hiérarchique, où celles et ceux qui en assurent la fonction ont passé des concours.

Ici rien de tel, puisque les conseiller·ères techniques sont choisi·es par l’administration et n’ont pas de fonction pérenne : elles·ils sont sur des postes à profil, dépendant uniquement du bon vouloir des recruteurs. Ce CT sera essentiellement une courroie pour mettre en œuvre la politique décidée par le MENJ, les PsyEN et DCIO ne seront pas plus consultés (ou entendus). 

Cette nouvelle « structuration » risque d’avoir des conséquences néfastes en termes de conditions de travail et de salaires. Les corps de fonctionnaires qui relèvent aujourd’hui de la catégorie des « personnels médico-sociaux » ne sont pas traités comme les corps d’enseignement, auxquels les PsyEN appartiennent : pas de PPCR (donc pas d’accès à la hors classe avant le départ en retraite, pas de classe exceptionnelle), des horaires d’au moins 39h hebdomadaires effectives devant public, pas de temps FIR. Plusieurs rapports ont déjà recommandé de faire passer les PsyEN dans le BOP 230 qui concerne ces catégories de personnels.

Cette décision ne peut que poser des problèmes sur le terrain car ce·tte conseiller·ère technique ne sera pas dans une position hiérarchique. Comment pourra-t-elle alors assurer l’évaluation et le suivi de la mise en œuvre du développement des compétences psychosociales des élèves et de la politique « École promotrice de santé » auprès des PsyEN et des DCIO ? Quelle articulation entre son rôle et celui des IEN-IO et des CSAIO ?

Nul doute que l’existence de cette fonction sera un appel d’air pour la création de fonctions identiques dans les rectorats et les DSDEN.

La montée préoccupante des manifestations psychologiques des adolescent·es depuis la COVID-19 a mis la question de la santé mentale sur le devant de la scène.

Mais avec quels objectifs ? Plusieurs auteurs [ii] ont dénoncé la conception très « normalisante » et hygiéniste des comportements jugés nécessaire pour tendre vers une « bonne santé mentale ». Il s’agirait d’apprendre aux enfants au plus tôt à adopter les « bonnes pratiques » au même titre que de manger 5 fruits et légumes par jour.

Mais jamais ne sont interrogées ni l’expérience subjective des adolescent·es, ni les conditions qui produisent cette augmentation des difficultés psychologiques, en particulier dans l’École.

  • En quoi une École basée sur la performance et l’élimination des plus fragiles a-t-elle une responsabilité dans la production des troubles anxieux des élèves ?
  • En quoi une déstabilisation des enseignants par la multiplication accélérée des reformes qui remet en cause leur cadre de travail et leurs valeurs, n’est-elle pas une source d’inquiétude pour les adolescent·es, les incitant parfois à tester le cadre et les privant de nouvelles figures d’identification potentielles ?
  • En quoi enfin, une conception atomisée de la « bonne santé mentale » découpée en tranches de difficultés, attribuées chacune à un référent, peut-elle  correspondre à ce que la psychologie nous a enseigné sur le développement des enfants et des adolescent·es ?

L’état psychologique de la jeunesse est effectivement préoccupant. Mais la place des psychologues de l’Éducation nationale, en accord avec leur déontologie, est d’interroger ce qui le produit et de contribuer à la création d’espaces de développement et d’émancipation, pour que les élèves puissent échapper aux sirènes de la médicalisation et du renoncement.

Dans ce contexte, c’est avec la plus grande vigilance qu’il convient d’analyser les recommandations édictées dans le rapport de l’IGESR, relatif aux PsyEN EDO, publié en mars 2024 (n°22-23 253B). L’analyse du SNES-FSU de ce rapport est en cours et sera prochainement publiée sur ce site.


[i] Rapport R. Reda (https://www.snes.edu/article/rapport-reda-et-sante-scolaire/)

[ii] Xavier Briffault, Santé mentale et santé publique – Un pavé dans la mare des bonnes intentions, PUG, 2016


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