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« La réforme simplifie l’examen, qui est devenu trop complexe », affirmait le ministre dans la présentation de son projet en février dernier, une complexité qui en « fragilise l’organisation » poursuivait-il. La communication gouvernementale sur les réformes du bac et du lycée se saisit maintenant de la période du baccalauréat pour plier l’événement à une démonstration qui vise à déminer les critiques sur les réformes à venir et à en masquer les enjeux réels.

Pendant que les 753 148 candidats planchent sur les épreuves du bac, le ministère déroule le discours de la complexité de l’opération en accumulant les chiffres. 2 900 sujets, 174 000 correcteurs et examinateurs, 4 millions de copies à corriger, 5 euros par copie, 9,60 euros de l’heure pour l’interrogation orale… Tout devrait concourir à démontrer que l’examen national est une charge plutôt qu’un investissement, afin de promouvoir une réforme affichée comme simplificatrice et moins coûteuse.

Choc de complexification

Dans le projet de réforme du baccalauréat, 30 % de la note finale reposerait sur trois séries d’épreuves communes de contrôle continu, organisées en Première (deux sessions) et en Terminale (une session). Celles-ci porteraient sur les disciplines de tronc commun (sauf français et philosophie ; l’enseignement scientifique ne serait évalué qu’une seule fois, en Première), et la spécialité abandonnée en fin de Première (une seule fois). Elles seraient organisées à l’échelle de chaque établissement, avec un anonymat des copies réduit à des échanges entre correcteurs du lycée ou éventuellement du bassin. Les sujets seraient choisis par chaque équipe, dans chaque lycée, au sein d’une banque nationale de sujets. Les évaluations seraient harmonisées académiquement. Cela aboutirait à un très grand nombre d’épreuves à passer pour les élèves, et à organiser pour les lycées. On peut dénombrer de dix-huit à vingt-trois épreuves communes, en fonction de la nature des épreuves, sans compter l’EPS (en CCF) et les épreuves terminales. On voit déjà poindre la tentation de modes d’évaluation standardisés avec le développement des outils numériques et la dématérialisation accrue des épreuves. Peut-être faut-il entendre de cette manière la volonté ministérielle de passer à une forme d’industrialisation (sic) de la conception de sujets pour alimenter des banques numériques dans lesquelles les enseignants devront obligatoirement puiser ?

En tout état de cause, si le ministère estime que le bac actuel « pèse lourdement sur la vie des lycées », on voit mal comment l’organisation pourrait en être allégée quand chaque établissement devra mettre en place une session d’examen tous les trois mois !

Impossible égalité de traitement

Qualifier de garantie d’anonymat un protocole d’échange local de copies relève de l’escroquerie. Aucune banque de sujets, si bien faite soit-elle, ne pourra compenser le poids de l’arbitraire, engendré par le principe de l’organisation locale de l’examen. Quelle que soit la configuration choisie, variable d’un lycée à l’autre, cela ne peut créer les conditions suffisantes de neutralité pour tendre vers une égalité de traitement entre les candidats. Ce n’est en rien comparable à l’organisation d’épreuves finales avec jury anonyme, mixage des copies de tous les lycées, et sujet national. Cela suffit à donner prise aux réputations des établissements dans la valeur que les formations de l’enseignement supérieur accorderont au baccalauréat.

À moins que l’objectif ultime de cet échafaudage de réformes, du lycée à l’enseignement supérieur, ne soit d’étouffer à terme le premier grade universitaire sous le poids d’injonctions bureaucratiques, parfois contradictoires, et d’achever le projet d’un continuum de parcours individuels, où le bac deviendrait sans objet, donc obsolète.

Pour contrer ces discours délétères, pour expliciter les menaces qui se cachent sous ce projet de réforme – et sous la réforme du lycée, plus largement – le SNES-FSU a mis en ligne sur son site huit « fiches désintox ». À consulter, à diffuser, à afficher sans ­modération !

Claire Guéville

Le bac, un examen national à abattre


Le think-tank social-libéral Terra Nova vient de publier un nouveau rapport, dans lequel les auteurs se désespèrent d’un projet de réforme encore trop éloigné du diplôme ­d’établissement. Affichant un mépris explicite à l’égard de l’actuel diplôme, qualifié de « rite » de la « dramaturgie scolaire » et de « fétiche », il prône une organisation purement locale de l’examen en affirmant de façon péremptoire que « le contrôle continu peut, à la marge, s’adapter aux publics des établissements et faciliter la réussite pour les élèves des lycées plus fragiles. Les mêmes épreuves pour tous conduiraient ces établissements à afficher des résultats moins bons pour leurs élèves et ceux-ci, de fait, auraient moins de possibilités dans Parcoursup ». Pourtant, un rapport du CNESCO de 2016 démontre exactement le contraire. En réalité, des épreuves nationales, identiques pour tous les élèves, sont des garanties pour assurer le progrès de tous les élèves, surtout les plus fragiles, car cela oblige à la même exigence partout sur le territoire.

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