Emmanuel Macron a réitéré son engagement de campagne de suppression de 120 000 emplois de fonctionnaires. Qui peut penser que l’Éducation nationale, premier employeur dans la Fonction publique d’État, n’y versera pas son écot ? La « priorité au primaire » et l’afflux de nouveaux étudiants dans les universités fait du second degré le seul « vivier » où ces suppressions sont, pour le gouvernement, envisageables. La réforme du lycée, par les regroupements qu’elle autorise, les réductions horaires, les choix qu’elle contraint, permet ces économies.

Versailles : Solde négatif

Ne jamais parler moyens : Jean-Michel Blanquer a fait de ce terme un mot tabou, réfutant toute volonté de supprimer des postes. L’académie de Versailles, avec ses 73 LGT et 73 LPO, ses nombreuses inégalités économiques et sociales, se révèle être le lieu idéal pour estimer les futurs dégâts du lycée Blanquer. Le bilan de l’enquête menée par le SNES-FSU Versailles est sans appel : une très grande majorité des lycées perdraient des heures, et donc des postes.

Les options payent un lourd tribu. Ainsi le lycée Richelieu (Rueil-Malmaison, 91), le lycée Corot (Savigny-sur-Orge, 91) ou le lycée Rosa-Parks (Montgeron, 91) perdraient respectivement 214 heures, 186 heures et 241 heures. L’ampleur de ces diminutions s’explique aisément : ces lycées, au profil différent, offrent de nombreuses options ou spécialités artistiques qui bénéficient, pour bon nombre d’entre elles, d’une forme de financement spécifique. Dans le lycée Blanquer, tout ce qui vient en plus des enseignements obligatoires relève des heures attribuées à l’établissement dans la « marge » : dédoublements, options, AP, etc. Dans la bataille de tous contre tous qui est ainsi organisée pour la répartition de la marge, les options pourraient être les premières sacrifiées. Conséquence : un lycée qui renoncerait à son ambition d’ouverture culturelle, et qui renverrait ces enseignements vers la sphère privée et familiale, creusant ainsi un peu plus les inégalités existantes.

Un précédent en collège

L’expérience de la réforme du collège permet de mieux décrypter les résultats obtenus : ces deux réformes – collège et lycée – sont construites selon le même modèle, notamment à travers le renvoi systématique à l’autonomie de l’établissement : le choix local de l’utilisation de la « marge horaire ». La mise en place de collège2016 a été peu indolore d’un strict point de vue comptable (il en a été tout autre du quotidien des collègues concernés), car la « marge » a été abondée au-delà des obligations réglementaires, accréditant ainsi l’idée que cette réforme n’était pas comptable. Or, à l’occasion de la préparation de la rentrée 2018, dans l’académie, de nombreux collèges, notamment dans le 91, ont pointé l’insuffisance des moyens accordés, avec à la clé une augmentation des effectifs dans les classes. L’explication : la marge a servi de variable d’ajustement. Le même tour de passe-passe s’annonce dans les lycées, mais l’application stricte des grilles du lycée Blanquer ne laisse aucun doute : il s’agit bien d’une réforme permettant, comme celle du collège, de faire des économies sur le dos des élèves et des personnels.

Sophie Vénétitay

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