Les annonces ministérielles veulent s’inscrire dans le programme du « choc des savoirs ». En guise de « choc », on assiste à l’achèvement du projet macronien mis en place depuis 2017 avec les lois ORE (Orientation et réussite des étudiants) et École de la confiance, les réformes du bac, des trois voies du lycée. D’ailleurs, le ministre Attal l’a dit lors de sa conférence de presse ce mardi : il faut accélérer !

On peut mesurer aussi tout le cynisme d’un ministère qui refuse d’entendre les enseignants sur des allégements de programme en septembre au nom de la nécessité de retrouver de la stabilité dans l’organisation du lycée et du bac, pour finalement nous pondre une nouvelle épreuve anticipée sur un programme et des modalités non seulement inconnues mais dont les bases en elle-mêmes sont floues, y compris pour le ministère.

Dans la continuité du désastre

Tous les éléments des projets portés par l’ancien ministre Blanquer sont donc repris et renforcés :

  • le scientisme, qui fait de la « science officielle » le censeur des contenus et des dispositifs pédagogiques ;
  • des manuels scolaires « officiels » afin de formater les pratiques pédagogiques ;
  • le numérique et l’intelligence artificielle (IA) un levier de dépossession du métier enseignant et de management ;
  • la caporalisation des personnels ;
  • l’orientation de plus en plus précoce des élèves et une sélection, guidée par une « liberté de choix » de « parcours individuels » conditionnés par le « mérite » ;
  • l’individualisation des parcours scolaires et la dislocation des collectifs de travail par l’éclatement du groupe classe ;

Dans les déclarations du ministre Attal, tout y est y compris dans la méthode qui consiste à affirmer la priorité aux savoirs, et faire exactement le contraire !

Des annonces sous le signe de l’improvisation

Le DNB, examen d’entrée au lycée

Tous les recalés auront la possibilité d’intégrer une classe « prépa-lycée », implantée en lycée. Sur quel budget ? Quels enseignements ? Quels programmes ? Nul ne le sait. Par contre, cela concernerait plus de 10% des jeunes scolarisés en 3ème, si l’on s’en tient aux taux d’échec actuels au DNB. Pour le ministre, ce taux aurait d’ailleurs vocation à augmenter compte tenu de l’élévation des exigences à l’examen. Des dizaines de milliers de jeunes, voire une centaine de milliers, auraient donc vocation à intégrer ces classes.

Fin de l’harmonisation des notes d’examen ?

Que faut-il comprendre dans cette déclaration ministérielle ? « Je prendrai également une circulaire qui supprimera le « correctif académique » dès la session 2024 du brevet et du baccalauréat. Ce sont désormais les notes que vous attribuez, et elles seules, qui détermineront leur obtention par nos élèves. » La confusion entre « harmonisation » et « correctifs statistiques » est totale. Si le ministère dit mettre fin à l’harmonisation « au clic », ce n’est pas la fin de l’harmonisation des notes et de la pression qui s’exerce sur les évaluateurs. Le rapport de la Mission « Exigence des savoirs » le précise d’ailleurs en proposant la mise en place d’une hiérarchie intermédiaire avec un enseignant déchargé d’une partie de ses cours pour veiller à l’harmonisation des pratiques de ses collègues ! Cela renvoie aussi aux préconisations du Conseil nationale de l’évaluation de l’Ecole (CNEE).

Remédiation en Seconde sous la tutelle de l’Intelligence artificielle

Blanquer en révait, Attal le fait et peut déclarer: « Tous les élèves entrant au lycée seront désormais accompagnés, à la maison, d’un outil d’IA de remédiation ou d’approfondissement en français et en mathématiques. Ce logiciel souverain, construit avec des chercheurs et des enseignants, propriété du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, sera mis gratuitement à disposition de 200 000 élèves de 2nde dès les prochains mois, avant d’être généralisé à l’ensemble des élèves de 2nde à partir de septembre prochain. La France sera ainsi le premier pays au monde à généraliser à l’ensemble d’une classe d’âge un outil d’élévation du niveau fondé sur l’intelligence artificielle.« . Le dossier de presse fait la part belle à cet outil dont on se demande s’il n’est pas le signe le plus puissant de la défiance que le ministère entretient vis à vis des enseignants. Et ce d’autant plus que cela ne se limite pas aux séquences de remédiation dans les « fondamentaux » mais aussi, et surtout, dans l’enseignement des langues vivantes.

Epreuve anticipée de mathématiques en fin de Première, mais laquelle ?

Les différences de formulation entre les propos ministériels , y compris dans sa lettre aux enseignants, et ce qui figure sur le site du ministère , laissent perplexe. Qui ou quoi faut-il croire ? Le ministre qui déclare cela :

« Une évaluation de la culture mathématique et scientifique avec une épreuve anticipée en fin de classe de première générale et technologique.
Le baccalauréat général compte aujourd’hui trois épreuves terminales communes à tous les élèves, toutes relevant des humanités, avec l’écrit de français, l’oral de français et la philosophie. L’absence d’épreuve commune permettant de certifier le niveau des élèves en mathématiques en fin de classe de 1re n’est pas satisfaisante.

Ou le ministère qui affiche ce qui suit :

« Une nouvelle épreuve anticipée de mathématiques appliquées sera instaurée en fin de 1re générale et technologique. Elle permettra de tester la capacité des élèves à comprendre les principaux objets mathématiques indispensables à tous, à résoudre des problèmes fondés sur des données et à construire un raisonnement logique.
« 

La nouvelle épreuve relèverait-elle uniquement des mathématiques… ou pas ? Quelle articulation avec les enseignements de spécialité, que ce soit dans la voie générale ou la voie technologique ?

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