Dans la ligne du Plan Etudiants lancé par le gouvernement à l’automne 2017 et de la loi Orientation et réussite étudiante (8 mars 2018), l’accès à l’enseignement supérieur est désormais réglé par une nouvelle plateforme qui remplace APB (Affectation post-bac). Articulée aux nouvelles procédures d’orientation dans l’enseignement supérieur, elle se caractérise par l’absence de hiérarchisation a priori des vœux des candidats, ceux-ci recevant des propositions,  » au fil de l’eau  » jusqu’en automne, après la rentrée universitaire. Elle a pour corollaire la généralisation des classements locaux des candidats par les formations supérieures dont les critères sont protégés par le secret des délibérations de jurys. Les personnels des lycées sont appelés en amont à compléter une  » fiche Avenir  » pour chaque vœux émis par le candidat à la poursuite d’étude. Celle-ci sert de support à la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur.
Décret Parcoursup du 9 mars 2018
Décret du 18 mai 2018 sur la procédure de préinscription
Arrêté du 19 juin 2018 créant un service à compétence nationale Parcoursup

La machine à trier

En amont, le jeu des classements avait déjà opéré un tri sur la base de logiques de discrimination liés à l’origine géographique et sociale. Les critères de sélection frappés du sceau du secret de la délibération des jurys sont certes inconnus, mais chacun a pu constater les grandes disparités de traitement entre les classes issues des lycées de centre-ville et ceux des périphéries. Clairement, Parcoursup a renforcé la machine à trier voulue par la loi, dans l’opacité la plus totale. Fort de ce constat, le Président du Conseil départemental de Seine St Denis, a saisi le défenseur des droits afin de faire la lumière sur les mécanismes de relégation qui semblent ici à l’œuvre. Elus, organisations syndicales dont la FSU, étudiants de l’UNEF et lycéens de l’UNL, parents d’élèves avec la FCPE, tous ont aussi interpelés les ministres, la CNIL et maintenant le défenseur des droits pour demander la levée du secret des algorithmes locaux et dénoncer ce qui ressemble bien à un tri en fonction de l’origine sociale et géographique des lycéens. Etant donné le nombre de personnes concernées et les questions de discrimination et de relations des usagers avec le service public qui se posent, le gouvernement est au pied du mur et se doit d’apporter des solutions immédiates.

Des listes d’attentes à rallonge

Si les concepteurs de Parcoursup, Hugo Gimbert et Claire Mathieu, se déclarent satisfaits de la plateforme , ils reconnaissent néanmoins l’allongement et le blocage des listes d’attente. A propos des candidats sans proposition, Claire Mathieu a publiquement déclaré : « C’est fini mais ils ne savent pas que c’est fini »… On s’explique alors très bien la succession accélérée d’injonctions auprès des candidats à abandonner ses voeux en attente ou bien, auprès des formations , à pratiquer du surbooking. On comprend aussi comment l’affichage du rang d’attente a pu jouer un rôle dissuasif poussant les candidats à renoncer. Tout l’été de dizaine de milliers de jeunes a donc consisté à se connecter tous les jours à Parcoursup pour évaluer les chances d’obtenir une affectation.

Des chiffres truqués

Le Ministère de l’enseignement supérieur est enfermé dans le déni et multiplie les éléments de langage totalement hors-sol.
Si la ministre de l’enseignement supérieur reconnaît aujourd’hui au dispositif le défaut de la lenteur, elle s’enferme dans un discours de déni, répétant à l’envi que le système serait plus  » humain « . A ce jour, près de 150 000 candidats ne sont pourtant toujours pas fixés sur leur avenir d’étudiant. Certains attendent que leur vœu préférentiel se débloque pendant que les autres sont en attente ou sans aucune proposition.
Le Ministère de l’enseignement supérieur publie un tableau de bord quotidien de Parcoursup au nom de la transparence, mais truque les chiffres et change les règles du jeu en cours de partie. Considérés comme  » inactifs « , près de 50 000 candidats ont été effacés des compteurs fin juillet. En liste d’attente, ils sont pourtant bien réels… Et c’est sans compter les 15 000  » sans proposition « , devant la commission académique ou en phase complémentaire. En face, les formations supérieures peinent à remplir. La date limite d’inscription, notamment en BTS et CPGE, est maintenant avancée d’une semaine, quitte à forcer la main aux quelques 88 000 candidats qui espéraient encore obtenir leur vœu préféré. En panne de solution, ne resterait-il donc plus au gouvernement que le mensonge ? Que ce soit le conseil scientifique et éthique nommée en février pour surveiller le fonctionnement de la plateforme ou bien le comité de suivi de la mise en oeuvre de la loi ORE, présidé par un proche collègue de Hugo Gimbert, qui vont faire taire les inquiétudes.

Colmatage des brèches

Sous le prétexte d’abandonner le tirage au sort d’APB (0,5 % des bacheliers), la procédure mise en place institue ainsi une sélection de fait à l’université, dont les enfants des classes populaires sont les premières victimes. La phase complémentaire d’affectation et les commissions académiques d’accès à l’enseignement supérieur, parfois réduites à un simple numéro vert entre le l4 juillet et le 15 août, institutionnalisent l’orientation par défaut et ne pourront en aucun cas masquer le manque de places, en particulier pour les bacheliers technologiques et professionnels.

Décret du 18 mai instituant les CAES
Ces commissions doivent à la fois traiter les dossiers de recours concernant les candidats partout refusés ou en attente, mais aussi les cas des situations de handicap, totalement oubliés dans le dispositif initial.

Publié le 1er juillet, le Décret « Meilleurs bacheliers » est supposé fonctionner comme un coupe-fil en donnant aux 10% des meilleurs bacheliers une priorité d’accès dans les formations initiales de l’enseignement supérieur.

Une circulaire du 18 juillet crée en catastrophe des classes passerelles (de 2 à 4 par académies) afin d’y affecter prioritairement les bacheliers professionnels qui n’auraient pas eu d’affectation et qui saisissent la commission académique d’accès à l’enseignement supérieur.
BTS Passerelles sont mises en place sous l’égide de la MLDS. « Les élèves concernés sont ceux qui n’ont eu aucune proposition d’admission en STS, bien qu’ayant reçu en terminale un avis favorable du conseil de classe (lorsqu’ils sont issus d’une terminale professionnelle et appartiennent à une académie qui met en place l’expérimentation issue de l’article 40 de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté) ou du chef d’établissement dans les autres académies.
Ces classes sont créées sous la forme d’une formation complémentaire d’initiative locale (FCIL). »
Afin de stimuler le choix d’une inscription dans une formation éloignée des voeux initiaux, le CROUS peut verser au candidat une prime à la mobilité entre 200 et 1000 euros . Voir ici la circulaire du 12 juillet 2018

Face à cette situation inédite sous bien des aspects, le SNES-FSU demande dans les plus brefs délais un bilan de Parcoursup pour une refonte du système d’affectation post-bac et un plan d’urgence d’investissement dans l’enseignement supérieur.

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